Depuis le mois de février, je sillonne le Québec avec mon conjoint pour faire des conférences horticoles.On me parle de maladies fongiques incurables, d’infestation de scarabées japonais et de bien d’autres insectes encore.

En revenant chez moi après l’une d’elles, je suis partie dans mes souvenirs d’enfance. Dans les jardins de mon père, je ne me rappelle pas avoir vu du mildiou ou bien des ravages causés par les insectes. Sauf, bien sûr, ceux causés par les « bibittes à patates », comme on les appelait. Mais leurs dégâts étaient vite réduits à néant, car on jouait à les ramasser dans de vieilles boîtes de conserve. Mon père s’en occupait ensuite.

Alors pourquoi aujourd’hui, avec tous les produits miracles que le marché propose, avons-nous tant de problèmes? C’est là que je désire vous amener à une certaine réflexion.

La plupart de ces insectes indésirables – les altises, les scarabées japonais, les chrysomèles et les criocères – ne sont pas originaires d’ici. Ils nous arrivent sous forme de larve sur les fruits et légumes exotiques que nous consommons. Nos prédateurs naturels, comme le crapaud, la couleuvre ou les oiseaux insectivores, prennent quelques années à les reconnaître comme de la nourriture. Si nous intervenons avec des insecticides chimiques, nous risquons de tuer ces prédateurs naturels, pourtant beaucoup plus efficaces que tous ces produits. Rappelez-vous quand les perce-oreilles sont arrivés chez nous. Il y en avait tellement! Pourtant, aujourd’hui, on les remarque beaucoup moins. Pourquoi? Nos amis les prédateurs font maintenant, avec eux, leur ouvrage.

L’exemple de la forêt

En forêt, la terre est riche et pleine de fibres. Les feuilles et les épines tombent au sol et pourrissent. Le bois mort en fait tout autant. Photo : Shutterstock

Maintenant, parlons des maladies fongiques. J’ai remarqué que dans les forêts, on voit très rarement du mildiou ou de l’oïdium. Comme on ne voit pas de scarabées japonais proliférer dans le bois. Pourquoi? Devrions-nous penser que les spores ou les insectes connaissent les limites de nos cours?  

Sûrement pas, mais je crois fermement que la terre y est pour beaucoup. En forêt, la terre est riche et pleine de fibres. Les feuilles et les épines tombent au sol et pourrissent. Le bois mort en fait tout autant; le foin et les feuilles de ­framboisier suivent la même cadence. Et, ce faisant, ils procurent au sol des engrais azotés et du carbone nécessaires à la santé des végétaux.  

Plus votre terre sera riche, plus vos plantes seront en santé et capables de repousser les insectes et les maladies fongiques. Votre cour est comme un ring de boxe. Les agresseurs auront plus de chances de remporter la partie s’ils s’attaquent à des plants déjà affaiblis par les engrais chimiques et les pesticides.

Plus votre terre sera riche, plus vos plantes seront en santé et capables de repousser les insectes et les maladies fongiques. Photo : Shutterstock

Donc, nourrissons notre terre comme il se doit. Redonnons-lui les feuilles mortes que l’on aura hachées à l’automne, le gazon coupé et notre compost maison. Laissons-la se nourrir. En effet, si j’ai une certitude au sujet de cette nature qui nous entoure, c’est que la terre se nourrit de ses déchets. Ne l’affamons pas en étant trop « propres » dans nos jardins. J’entends encore la voix d’un vieux qui me disait, il y a bien longtemps, en coupant la queue de sa carotte pour l’enfouir dans la terre de son jardin : « Rendons à César ce qui revient à César. »  

Bon jardinage! xx