Politique 10 avril 2024

QS demande au gouvernement de créer un fonds d’urgence pour les agriculteurs

En réponse à la crise qui frappe actuellement le secteur agricole au Québec, Québec solidaire (QS) demande au gouvernement de la Coalition avenir Québec (CAQ) de créer un fonds d’urgence pour les agriculteurs en prévision de la saison des récoltes. 

À la fin du mois de mars, le premier ministre François Legault a qualifié de « crise » les difficultés auxquelles sont confrontés les agriculteurs, et promis de les aider davantage. Toutefois, selon le co-porte-parole de QS, Gabriel Nadeau-Dubois, le gouvernement doit agir plus rapidement. 

« On ne peut pas attendre le prochain budget pour donner un peu d’air aux producteurs agricoles. Bien sûr, il y a beaucoup de choses à faire, il y a beaucoup de programmes à revoir, et il y a des enjeux qui ne se régleront pas en quelques jours. Mais un geste que le premier ministre doit poser rapidement, c’est de débloquer un fonds d’urgence pour donner une aide financière immédiate aux producteurs agricoles qui en ont besoin, parce que la dernière saison a été catastrophique, et que 2024 s’annonce difficile aussi », a-t-il détaillé, en entrevue. 

Plusieurs manifestations d’agriculteurs ont eu lieu dans différentes régions de la province au cours des dernières semaines. Le 5 avril, la Fédération de l’Union des producteurs agricoles (UPA) de la Montérégie a tenu une manifestation à Saint-Jean-sur-Richelieu, où plus d’une centaine de tracteurs ont circulé dans les rues. M. Nadeau-Dubois était sur les lieux. 

J’ai fait pas mal de manifestations dans ma vie, mais je n’ai jamais vu autant de détresse dans une manifestation, [ce que] j’ai vu vendredi. Je n’ai jamais vu ça dans une manifestation des hommes de 40, 50 ans, devoir interrompre leur discours parce qu’ils commencent à pleurer.

Gabriel Nadeau-Dubois

Le co-porte-parole de QS estime que le montant du fonds d’urgence doit être déterminé en discussion avec les producteurs agricoles. Il souligne que le montant consacré à l’agriculture dans le dernier budget du gouvernement est cependant insuffisant. 

« Les producteurs agricoles sont frappés de plein fouet par les changements climatiques, et ce sont un peu les canaris dans la mine. C’est le premier secteur de l’économie à être frappé aussi fortement, mais progressivement, ce sont tous les secteurs de l’économie qui vont finir par être frappés », a affirmé M. Nadeau-Dubois. 

Les manifestations se poursuivent

Les producteurs agricoles continueront de se faire entendre dans les prochaines semaines. La Fédération de l’UPA de la Montérégie prévoit tenir une nouvelle manifestation le mercredi 10 avril à Vaudreuil-Dorion, et une autre le vendredi 12 avril sur le site de l’Expo agricole de Saint-Hyacinthe. 

Une manifestation devrait aussi avoir lieu en Outaouais cette semaine, et dans d’autres régions les semaines suivantes, dont Chaudière-Appalaches et le Centre-du-Québec, a indiqué Martin Caron, président général de l’UPA. 

« Présentement, on n’a rien à dire à nos gens, a affirmé M. Caron, en entrevue. Oui, les gens du gouvernement nous écoutent, mais au-delà de ça, ça va prendre des gestes concrets. »

Alors que les producteurs agricoles ressentent encore les contrecoups de la saison des récoltes de l’année dernière, plusieurs font des changements en prévision de cette année. 

« Sachant que 2023 n’est pas réglé, il y a des marges de crédit qui sont rendues plus pleines », a expliqué M. Caron. 

« Les gens ont choisi de faire moins de superficies, de se mettre moins à risque. Il y a d’autres entreprises qui ont carrément décidé d’aller dans d’autres productions qui sont moins à risque. »

Le président de l’UPA déplore que les programmes d’aide aux agriculteurs ne soient pas adaptés à la nouvelle réalité des changements climatiques, alors que, par exemple, des producteurs de l’Abitibi-Témiscamingue ont dû composer avec la sécheresse et des feux de forêt l’an dernier. 

Il souligne que les coûts de production ont également augmenté au cours des dernières années. « Ça ajoute à cette tempête économique qu’on voit sur nos entreprises », a dit M. Caron, qui a aussi souligné la hausse des taux d’intérêt comme facteur aggravant. 

M. Caron déplore également que les programmes destinés aux jeunes agriculteurs ne soient pas actualisés, dans un contexte où 40 % des fermes au Québec n’ont pas de plan de relève, selon l’UPA. 

« La donnée qu’on voit présentement et qui nous préoccupe, c’est 44 % des jeunes [où] il y a un conjoint ou une conjointe qui va aller chercher de l’argent dans un travail extérieur pour être capable de faire des paiements sur leur ferme. Et ça, c’est la nouvelle réalité qu’on voit, c’est de là qu’on voit qu’il y a un découragement de nos jeunes », a-t-il expliqué. 

Les producteurs agricoles demandent notamment à ce que les programmes du fédéral et du provincial soient actualisés en prévision de l’impact des changements climatiques. M. Caron a indiqué que l’UPA demande un « bouclier financier agricole » de la part du gouvernement provincial pour pallier la hausse des taux d’intérêt pour les entreprises agricoles en difficulté et en démarrage.

Le cabinet du ministre de l’Agriculture, André Lamontagne, a réagi par courriel à la demande de QS, le 7 avril. 

« Actuellement, les équipes de La Financière agricole s’activent à rejoindre plus de 2 600 entreprises jugées plus à risque pour leur offrir un accompagnement personnalisé. On ne veut laisser personne derrière. En prévision de la saison 2024, le ministre Lamontagne a demandé à La Financière agricole d’être prête à réagir rapidement en cas de météo difficile », peut-on lire. 

Le cabinet a aussi dit qu’il va « continuer d’être là pour nos producteurs et productrices qui font face à une conjoncture difficile ». « Dès le début de l’été 2023, nous avons créé un Fonds d’urgence qui peut injecter jusqu’à 167 M$ pour épauler les agriculteurs avec leurs liquidités », a souligné le cabinet.


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