Main-d'oeuvre 1 novembre 2024

TET : de nouvelles normes de logement, oui, mais…

En matière de logement destiné aux travailleurs étrangers temporaires (TET), de nouvelles normes sont appelées à se déployer d’ici le printemps 2026. Si des améliorations sont demandées par certains travailleurs, les producteurs se disent ouverts, mais espèrent que les défis à relever seront pris en compte.

La qualité de l’hébergement et l’entassement figurent parmi les doléances les plus souvent exprimées par les TET. Durant la pandémie, des problèmes avaient aussi été soulevés. La norme fédérale minimale de 45 cm entre les lits ne permettait pas la distanciation, y compris pendant la quarantaine imposée à leur arrivée. Les lits à deux étages et le nombre d’occupants par chambre sont donc notamment visés.

Actuellement, les normes en application proviennent d’Emploi et Développement social Canada et sont inférieures à ce qui est prévu par un règlement en vigueur au Québec pour les autres types de logements (industriels, miniers ou forestiers, par exemple). Jusqu’ici, la province n’incluait pas les TET dans la mise en pratique de ce règlement, s’en remettant aux minimums fixés par le gouvernement fédéral.

Dorénavant, Québec veut arrimer l’hébergement du personnel agricole avec celui des autres travailleurs dont le logement est fourni par l’employeur. Le nombre de personnes par chambre fait encore l’objet de discussions, mais serait limité à deux, et les lits superposés seraient interdits. La superficie habitable minimale établie à 7 m2 par individu, chambre et aires communes combinées, fait elle aussi l’objet de pourparlers.

Des règlements quasi insurmontables

« Pour les prochaines constructions, il y a assurément une ouverture de notre part à utiliser de nouveaux paramètres, note Patrice Léger Bourgoin, directeur général de l’Association des producteurs maraîchers du Québec. Cependant, pour pouvoir adapter les bâtiments actuels, il va y avoir plusieurs défis réglementaires presque insurmontables dans la majorité des cas, entre autres pour l’élément urbanisme. »

Le dirigeant évoque en particulier la réglementation qui concerne les installations septiques et qui pourrait contrecarrer l’agrandissement des bâtiments.

D’un point fiscal, il y a également un enjeu important à résoudre, ajoute-t-il. Un producteur ne peut pas réclamer la TPS et la TVQ comme c’est le cas pour un logement locatif, donc un immeuble à revenus. Il existe présentement des incongruités dans la loi.

Patrice Léger Bourgoin, directeur général de l’APMQ

Invité par la CNESST

Aux commandes de la ferme maraîchère Delfland inc., Éric Van Winden a été invité par la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) pour que lui soient exposées les normes à l’étude. Le producteur situé à Napierville, en Montérégie, embauche près de 120 TET et se dit lui aussi plutôt favorable au rehaussement des normes de logement, mais s’estime déjà proactif.

« Dans mon optique, si les travailleurs sont bien, s’ils ont un bon sommeil, je vais être récompensé le lendemain dans les champs, témoigne le producteur. J’essaie, par exemple, d’avoir des logements propres, et les sept que je possède sont tous climatisés. [Du côté des] réfrigérateurs, on tente également d’offrir un peu plus que la norme. Mais si des ajouts sont imposés, on s’attend à ce qu’une enveloppe vienne avec. »

Les TET doivent contribuer

M. Van Winden rappelle que des investissements non négligeables seront requis pour respecter la nouvelle réglementation et que la somme que doit verser chaque TET au producteur qui l’héberge n’a pas été ajustée depuis dix à quinze ans. Il souhaite que le montant payé par le travailleur pour se loger soit augmenté afin de refléter davantage les coûts que seuls les producteurs encaissent pour l’instant.

« On veut qu’ils participent aux dépenses, conclut le maraîcher. Il faut que le tarif représente un peu plus les ajouts et le confort dont ils profitent. On est rendus en 2024! Aussi, ce qu’on demande à la CNESST, ce sont des clauses grand-père, de faire en sorte que pour les logements qui sont déjà en place, ce soit acceptable pour les producteurs agricoles, tout en étant bien pour les travailleurs étrangers. »