Environnement 2 septembre 2014

La gare à Mirabel : sur les rails de l’incohérence

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Québec fait preuve d’incohérence en permettant la construction d’une gare de trains de banlieue en zone agricole, à Mirabel.

« C’est là un exemple parfait de gaspillage de terres agricoles, d’étalement urbain inacceptable, bref une illustration de ce qu’il ne faut pas faire », ont dénoncé plusieurs organisations, dont l’Union des producteurs agricoles, en conférence de presse aujourd’hui.

« Installer une gare en pleine zone agricole n’a aucun sens et fait montre d’un manque flagrant de vision », a lancé le président général de l’UPA, Marcel Groleau.

« Nous ne sommes pas contre la gare, mais contre l’emplacement choisi, a renchéri le président de l’UPA Outaouais-Laurentides, Richard Maheu. À cet endroit, cette gare va vite favoriser l’étalement urbain. Et ça signifie aussi une série de restrictions pour les deux fermes en exploitation dans le secteur qui ont une relève assurée. »

Selon M. Maheu, « il est minuit moins une. Des propriétaires ont reçu un avis d’expropriation. Nous attendons toujours la réponse à notre proposition soumise en février dernier à l’Agence métropolitaine de transport (AMT) d’ériger la gare en zone blanche, sur un terrain plus grand que celui choisi en zone verte. Ma peur, c’est que Mirabel se dépêche à y faire pousser des maisons ».

Outre sa localisation inappropriée, l’organisme Vivre en Ville a questionné la pertinence de cette gare à Mirabel. « Et s’il doit y avoir une gare à Mirabel, c’est à l’endroit proposé par l’UPA, en zone blanche, aux abords de la rue Saint-Charles, qu’elle doit aller. Elle consoliderait alors le développement urbain tout en protégeant les terres agricoles », a en substance affirmé Alexandre Turgeon, président exécutif de cet organisme.

Pour Karel Mayrand, directeur général pour le Québec de la Fondation David Suzuki, la zone agricole fait partie de la ceinture verte souhaitée autour du Grand Montréal. « Le cas de Mirabel est un test important pour la crédibilité de l’engagement contenu au Plan métropolitain d’aménagement et de développement (PMAD) de protéger le patrimoine agricole », a-t-il affirmé.

Incohérence

M. Turgeon et André Bourassa, président de l’Ordre des architectes du Québec, ont dénoncé le fait que « l’AMT, un organisme public qui relève du ministère des Affaires municipales, des Régions et de l’Occupation du territoire, se fait complice d’un forcing pour sortir du territoire agricole. C’est inacceptable. Le gouvernement du Québec doit donner un minimum l’exemple ».

La position de Québec est loin d’être claire dans ce dossier. D’un côté, le ministre de l’Agriculture, François Gendron, parle de renforcer la loi sur le zonage agricole afin de préserver les terres agricoles et d’assurer la souveraineté alimentaire du Québec. Il a même demandé un avis à la Commission de protection du territoire agricole (CPTAQ) au sujet de l’emplacement de cette gare, fort douteux à ses yeux.

De l’autre côté, le ministre Sylvain Gaudreault, responsable des Transports et des Affaires municipales, n’intervient pas pour ramener à la raison l’AMT, qui relève de sa compétence. « Or ce projet risque d’être plus déstructurant que structurant pour l’aménagement du territoire », a fait valoir M. Bourassa. « C’est un signal envoyé aux municipalités de continuer à mal faire le développement de leur territoire comme elles le font depuis 40 ans, a souligné M. Turgeon. Il faut arrêter de reconnaître aux municipalités le droit de constamment s’agrandir. Il y a énormément de terrains disponibles en zone blanche pour du développement. »

Simple

Comment éviter cette erreur d’aménagement? « Ça prend un simple coup de téléphone du ministre Gaudreault à l’AMT et c’est tout », a avancé M. Turgeon. Pour le président Maheu, « Québec peut encore tout arrêter en refusant de verser sa part de 75 % du financement prévu pour la gare ».