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Aux prises avec un problème de fusariose dans ses champs de poireaux, une entreprise a fait le pari de remplacer certaines de ses rotations de cultures annuelles par des engrais verts pour améliorer la santé du sol. Le résultat s’est avéré aussi positif qu’avantageux d’un point de vue économique.
La Ferme Cultures de chez nous, située dans le Centre-du-Québec, produit annuellement six millions de poireaux qu’elle distribue dans les supermarchés de la province. Cette culture, qui s’étend sur plus de 40 hectares, était en rotation avec du maïs et du soya depuis plusieurs années.
La régie culturale en place donnait de bons résultats jusqu’en 2014, où une infestation de fusariose a entraîné des pertes importantes dans les poireaux. « L’événement a suscité beaucoup d’interrogations sur la cause du problème, se souvient Julie Street, conseillère de l’entreprise et agronome au Club Durasol Drummond. Après mûre réflexion, on est arrivés à la conclusion que l’infestation n’aurait pas dû arriver si le sol était en santé. Il fallait donc en améliorer la biodiversité. »
Introduction d’engrais verts
En se basant sur des essais menés par l’Institut de recherche et de développement en agroenvironnement (IRDA) sur l’introduction d’engrais verts dans les cultures de pommes de terre et de tomates, l’agronome a émis l’hypothèse que remplacer les rotations de cultures annuelles par des engrais verts allait améliorer la structure du sol et la vie microbienne pour ultimement accroître le rendement des récoltes de poireaux. « Couper les grandes cultures entraînerait une perte de revenus, mais peut-être que le gain à obtenir dans le poireau serait plus important. »
De 2016 à 2019, trois parcelles ont été mises sous essai. La première faisait office de témoin selon la régie habituelle, la seconde était semée d’engrais verts en intercalaire avec de l’avoine pour permettre une petite récolte, et la troisième a reçu des engrais verts qui ont été enfouis en fin de saison.
« Le choix des engrais verts était limité pour les poireaux, car on voulait éviter la présence de résidus qui compliquerait la plantation au printemps, précise Julie Street. On souhaitait aussi des plantes qui offrent un apport intéressant en azote. C’est pourquoi on a utilisé du trèfle incarnat, de la moutarde et de la vesce velue. »
Des effets à long terme
Les bénéfices des engrais verts se sont fait réellement ressentir au courant de la dernière année des essais. Dans les parcelles ayant bénéficié de l’apport des engrais verts, le sol était mieux structuré sur une profondeur de 2 cm de plus que la parcelle témoin. L’agronome a aussi constaté un effet positif des engrais verts avec la présence plus importante de bactéries et de champignons susceptibles de briser le cycle des maladies. « Peu à peu, le sol se stabilisait et retrouvait sa santé. »
Les cultures ont également semblé profiter de la présence des engrais verts. En 2019, les racines des poireaux étaient plus profondes de 4 cm que les légumes de la parcelle témoin. Mieux, le nombre d’unités vendables s’était amélioré. Ainsi, la parcelle témoin aurait produit l’équivalent de 124 167 poireaux vendables/hectare, la parcelle d’engrais verts d’été 127 500 et la parcelle d’engrais verts intercalaires 128 303, calcule l’agronome.
L’analyse économique du projet a permis d’estimer que la vente additionnelle de poireaux aurait non seulement compensé les pertes liées à l’abandon des cultures annuelles, mais également assuré des gains nets de 3 969 $/hectare (engrais verts d’été) et de 5 076 $/hectare (engrais verts intercalaires) sur une période de quatre ans.
Ces résultats font dire à l’agronome que remplacer des cultures annuelles par des engrais verts dans ses rotations de poireaux en vaut la chandelle. « À long terme, on peut améliorer la santé du sol grâce aux engrais verts en les introduisant aux trois ou quatre ans pour couper le cycle des maladies et améliorer la structure du sol, recommande Julie Street. Une chose est sûre, depuis qu’il a vu les résultats, le producteur met des engrais verts dans toutes ses rotations! »