Économie 24 mai 2017

La dette agricole atteint-elle une limite?

Le passif financier total des agriculteurs du Québec a augmenté de 3,6 G$ en cinq ans de 2011 à 2015, mais la valeur des actifs a grimpé de pas moins de 18,5 G$ durant la même période. Est-ce que ce niveau d’endettement représente quand même un problème?

C’est un peu la question que se pose le Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire de la Chambre des communes, qui s’est intéressé depuis un mois à la dette agricole et à ses effets. Plusieurs représentants du secteur ont été entendus par les députés fédéraux.

« Le problème de l’endettement, ce n’est pas la valeur de l’actif, c’est sa capacité de rendement », a soutenu Marcel Groleau, président de l’Union des producteurs agricoles (UPA) en entrevue à la Terre. Si les terres doublent de valeur, mais que le rendement qu’on peut en tirer demeure à peu près le même, « ça devient un frein pour la consolidation ou l’expansion des fermes ».

Le 9 mai dernier, l’UPA a souligné devant le Comité que le ratio d’endettement restait faible depuis plusieurs années et que la « marge de manœuvre qu’ont actuellement les entreprises permet de gérer les risques financiers ».

La hausse annoncée des taux d’intérêt pourrait cependant changer la donne. « Tant que les taux sont bas, ça se gère, mais une augmentation même minime de ceux-ci pourrait être problématique », prévient Marcel Groleau.

Michael Hoffort, président-directeur général de Financement agricole Canada (FAC), était devant le Comité le 11 avril. FAC, qui détient plus du quart de la dette agricole canadienne, a souligné que la vitesse de croissance du prix des terres a diminué pendant les trois dernières années. « En 2015, pour la première fois depuis de nombreuses années, la dette agricole a crû plus rapidement que la valeur de l’actif agricole », a ajouté Michael Hoffort. FAC demeure néanmoins confiant en l’avenir en raison notamment de bonnes perspectives de revenus agricoles.

Risques pour la relève

« Le problème, c’est que si une ferme est trop endettée avant le transfert, ça devient difficile pour la relève de financer son projet », a fait valoir à la Terre Michèle Lalancette, présidente de la Fédération de la relève agricole du Québec (FRAQ). Devant le Comité, le 2 mai, la FRAQ a rappelé que la dette peut être un levier si elle est justifiée. Michèle Lalancette a aussi demandé aux élus fédéraux de favoriser les « formules vendeur-prêteur » par un rabais d’intérêts. Celles-ci font que le cédant reçoit une sorte de rente à long terme, qui permet d’assurer sa retraite. « On enlève l’intermédiaire des banques », a expliqué Michèle Lalancette.