Bio 4 octobre 2020

Un système de récupération des eaux polyvalent et abordable

LES CÈDRES – Confrontée à une problématique de salinité de l’eau, la Ferme coopérative Tourne-Sol a mis au point un ingénieux système de récupération des eaux de drainage pour alimenter l’irrigation de ses serres, et ce, à faible coût.

Le réservoir consiste en une triple galerie de 75 morceaux de ponceaux de plastique d’une longueur de 8 pieds et d’un diamètre de 18 pouces.
Le réservoir consiste en une triple galerie de 75 morceaux de ponceaux de plastique d’une longueur de 8 pieds et d’un diamètre de 18 pouces.

Les deux serres pleine-terre de cette ferme biologique de Montérégie-Ouest constituent un actif de première importance pour Reid Allaway et ses compagnons. Or, ils ne pouvaient pas profiter pleinement de leurs installations puisque l’eau de leur puits artésien est saline. « On n’a pas de problème à irriguer les cultures au champ, car les pluies viennent lessiver le sel, mais dans les serres, ses effets néfastes se sont fait ressentir après quelques années sur certaines productions plus sensibles comme les poivrons, les piments forts et les cerises de terre. Il a donc fallu trouver des solutions », expose Reid Allaway, membre de la coopérative et bricoleur en chef.

La coopérative faisait face à une autre contrainte : sa superficie se limite à cinq hectares, ce qui rendait l’alternative d’un étang d’irrigation moins attrayante. De plus, le sol de la ferme est argileux et se retrouve souvent gorgé d’eau, motif pour lequel les champs sont drainés. « Le sol n’est pas bien structuré et il a tendance à s’affaisser. Creuser un étang aurait été inutile, mais de l’eau de surface était présente et des échantillons prélevés à la sortie des drains nous ont révélé que cette eau-là n’était pas saline, contrairement à celle du puits. »

La ressource était disponible, mais encore fallait-il la capter et la stocker. La solution est venue de l’esprit ingénieux d’un producteur voisin, Thomas Dewavrin, qui a imaginé un système de récupération des eaux de drainage.

Polyvalent et peu coûteux

En 2019, les deux hommes ont créé une triple galerie de 75 ponceaux de plastique double-parois de 18 pouces de diamètre, constituant ainsi un réservoir de 30 000 litres.

Le réservoir a été assemblé dans une tranchée de six pieds de profondeur sous le chemin d’accès menant aux serres et sous le niveau des drains, auxquels il a été relié. La triple galerie a ensuite été stabilisée à l’aide de pierres nettes, augmentant ainsi la capacité de stockage.  Par effet de gravité, l’eau du drain est déviée vers le réservoir, tandis que le trop-plein est renvoyé vers le fossé.

Le printemps suivant, la coopérative a connecté le réservoir à un puisard, et par le moyen d’une pompe submersible domestique modifiée, l’eau a pu être acheminée dans un système de filtration mécanique et de filtration à ultraviolet afin d’être stérilisée. Avec une capacité de 13 gallons/minute, ce système satisfait les besoins en irrigation goutte à goutte des serres de la ferme.

Non seulement le réservoir ne compte aucune pièce mobile, ce qui limite les risques de bris, mais l’ouvrage a nécessité peu d’investissement. Le projet a coûté environ

7 000 $, matériaux et main-d’œuvre compris. Reid Allaway a notamment trouvé les ponceaux chez d’autres producteurs et des compagnies d’excavation et il a déniché la pompe sur Kijiji. « Par sa simplicité, ce projet est intéressant pour les besoins et les contraintes d’espace de la ferme », ajoute-t-il.

L’amélioration des sols est au cœur de la mission de la Ferme coopérative Tourne-Sol. Cette année, l’équipe mène des essais avec des engrais verts dans l’une de ses serres. Le sorgho a particulièrement bien poussé.
L’amélioration des sols est au cœur de la mission de la Ferme coopérative Tourne-Sol. Cette année, l’équipe mène des essais avec des engrais verts dans l’une de ses serres. Le sorgho a particulièrement bien poussé.

Premiers résultats prometteurs

Après une première saison d’activité, le producteur maraîcher n’est pas peu fier du résultat. Malgré un printemps très sec, les réserves d’eau ne se sont pas taries. D’ailleurs, si l’eau du réservoir venait à manquer, la coopérative pourrait mettre à contribution l’eau du puits pour les cultures moins sensibles au sel. « Le système est encore en rodage. On a quelques défis au niveau de la filtration. On doit aussi apprendre à connaître la vitesse à laquelle le réservoir va se recharger, ce qui dépend de la météo, mais jusqu’à présent, c’est prometteur », dit M. Allaway.

Une chose est sûre, le nouveau système s’intègre bien dans la mission que s’est donnée la coopérative. « On veut avant tout que nos serres soient gérées de façon durable et qu’on finisse par trouver des procédés et des rotations de cultures qui permettent d’enrichir le sol tout en nourrissant des familles de la région. »