Page conseils 23 mars 2020

La litière de fumier recyclé : pas sans risques

L’équipe de recherche sur les litières de fumier recyclé (LFR) dévoile les premiers résultats du vaste projet de recherche démarré en 2017. Lors de la visite de 88 fermes, plusieurs échantillons de fumier, de litière de paille et de litière de fumier recyclé ont été amassés pour une série d’analyses en laboratoire.

Les participants ont prélevé du lait pour chaque cas de mammite expérimenté par les vaches de leur troupeau, et ce, pour une période d’un an. Le lait était ensuite acheminé à l’équipe de recherche pour analyse bactériologique.

En réalisant les analyses de parasitologie, les chercheurs ont mis en évidence que les fermes utilisant les LFR avaient une prévalence de Cryptosporidium spp dans le fumier nettement plus élevée (85 %) que les fermes sur litière de paille (49 %). De plus, la présence de cryptosporidies demeurait très élevée tout au long du processus de maturation de la litière, indiquant que le traitement du fumier pour en faire une litière n’élimine pas ce parasite très résistant.

Les analyses bactériologiques ont aussi mis en évidence que les fermes sur LFR avaient une prévalence plus élevée de Salmonella spp et de Listeria monocytogenes que celles utilisant la litière de paille. Pour ces raisons, la LFR ne devrait pas être utilisée sous les jeunes animaux de moins de six mois d’âge ou dans les aires de vêlage.

Infections transmissibles

De plus, la cryptosporidiose, la salmonellose et la listériose sont des infections zoonotiques, ce qui veut dire qu’elles sont transmissibles à l’humain. La contamination se fait le plus souvent par voie orale, c’est-à-dire lorsqu’on porte la main souillée à la bouche. La gravité est variable : les symptômes peuvent se limiter à de banals problèmes digestifs ou à de la fièvre, mais s’ils sont plus graves, ils peuvent mener à une hospitalisation. Des gants devraient donc toujours être portés lors de la manipulation de la litière et une bonne hygiène des mains est de mise pour l’ensemble des travailleurs de la ferme.

En ce qui concerne la santé mammaire, nous avons constaté que les fermes sur LFR expérimentaient le même nombre de cas de mammite clinique que celles utilisant la litière de paille. Cependant, les cas de mammite étaient six fois plus souvent causés par Klebsiella pneumoniae, un agent de mammite environnementale grave. Il s’agit d’un résultat important. Les vaches subissant un ­épisode de mammite à Klebsiella pneumoniae sont à risque élevé de perdre le quartier atteint, de mourir ou d’être réformées à cause d’une baisse de production. 

Annie Fréchette, Jessika Beauchemin, Marlen Lasprilla-Mantilla et Simon Dufour
Faculté de médecine vétérinaire, Université de Montréal, Saint-Hyacinthe