Alimentation 28 août 2014

Sécurité alimentaire : l’ONU et l’OMC ne s’entendent pas

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L’ONU s’en prend une nouvelle fois aux règles commerciales agricoles proposées par l’OMC qui sont jugées insuffisantes pour sauvegarder la sécurité alimentaire dans le monde.

Olivier de Schutter, rapporteur spécial des Nations Unies (ONU) pour le droit à l’alimentation, a déposé récemment un rapport dans lequel il demande à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) de « redéfinir » comment la sécurité alimentaire doit être intégrée aux accords multilatéraux de commerce.

M. de Schutter demande plus spécifiquement une plus grande flexibilité des politiques pour les pays qui veulent défendre leur sécurité alimentaire. Plusieurs recommandations précises sont avancées. M. de Schutter propose notamment de s’assurer que les offices de mise en marché et la gestion de l’offre ne soient pas compromis par un éventuel accord commercial. Toujours dans son rapport du mois de novembre, il soutient aussi le droit pour les pays en développement d’isoler certains marchés domestiques de la volatilité des marchés internationaux.

En cas d’échec de la ronde de négociations de Doha, le rapporteur spécial estime qu’on devrait revoir le cadre actuel de l’OMC afin de permettre davantage de mesures favorables à la sécurité alimentaire sans pour autant fausser les échanges commerciaux.

Réplique de Pascal Lamy

Le directeur général de l’OMC, Pascal Lamy, a longuement répliqué au rapporteur spécial de l’ONU afin de justifier l’approche actuelle dans les négociations agricoles multilatérales.

M. Lamy s’appuie notamment sur des études commandées par le G20 pour dire que le commerce est un élément important pour arriver à une plus grande sécurité alimentaire. Les signaux de prix permettent un ajustement de l’offre, qui peut être salutaire en cas de manque de nourriture. M. Lamy soutient que des aides qui faussent le marché, les subventions à l’exportation et des mesures imprévisibles de restrictions des importations et des exportations sont justement parmi les causes de la hausse du prix des aliments en 2008 et en 2010.

Sur la question des offices de mise en marché, l’analyse de l’OMC reconnaît la possibilité pour les pays de protéger certains produits sensibles par des tarifs. On met toutefois en garde contre un mauvais usage de cette politique, qui peut introduire des distorsions et de l’inefficacité dans le marché.

Conférence ministérielle à Genève

Cette réponse à l’ONU a été publiée juste avant l’ouverture de la conférence ministérielle de l’OMC, qui se tient à Genève du 15 au 17 décembre. Jusqu’à maintenant un accord sur les marchés publics (achats des gouvernements) a été atteint.

Le président du groupe de Cairns, l’Australien Craig Emerson, déclarait toutefois le 15 décembre que la ronde de Doha était dans l’« impasse » et que M. Lamy devrait développer un nouveau modèle « réaliste » pour permettre d’avancer.