Alimentation 21 février 2020

Le virage vert de Starbucks porte un coup dur aux producteurs laitiers

La décision de la chaîne Starbucks de favoriser les boissons végétales de soya ou d’amande au détriment des produits laitiers déçoit au plus haut point l’agriculteur Martin Nichols.

« Starbucks va mettre de la crème végétale par défaut dans les cafés au lieu de la vraie crème. L’entreprise dit que le lait devient un produit non intéressant pour l’environnement. C’est un coup dur pour les producteurs laitiers! Et j’ai peur que ça fasse boule de neige. Si McDo et d’autres grandes chaînes embarquent, je me demande de quoi ça va avoir l’air dans 10 ans », analyse le producteur dont la ferme laitière est située près de Saint-Hyacinthe.

Très présent sur les médias sociaux, M. Nichols assure que plusieurs autres producteurs laitiers n’apprécient pas ce signal qu’envoie la nouvelle stratégie de Starbucks.

Produits « environnementaux »

Rappelons que Starbucks, qui détient 1 400 succursales au Canada et près de 31 000 dans le monde, a rendu public le 21 janvier son engagement en matière de développement durable. Elle consiste entre autres à augmenter le nombre de produits « environnementaux » à base de plantes.

L’agence de presse Bloomberg rapporte les propos du président de Starbucks, Kevin Johnson, qui compte sur ses clients de la génération Z pour adopter ces pratiques environnementales, lesquelles devraient générer des gains financiers à long terme pour Starbucks.

Soulignons que la Montréalaise Saputo, l’un des plus grands transformateurs de lait au monde, a également mentionné lors de son assemblée générale annuelle du 8 août qu’elle lorgnait le marché des protéines végétales.

Un sondage donne le lait perdant

À la suite de la décision de Starbucks de diminuer progressivement ses utilisations de lait de vache pour des raisons environnementales, l’émission radiophonique Tout un matin diffusée sur les ondes de Radio-Canada dans le Grand Montréal a effectué un sondage maison le 10 février. Plus de 11 000 personnes ont répondu, et dans une proportion de 57 %, les répondants se sont dits prêts à remplacer le lait de vache par du lait végétal.

Le porte-parole des Producteurs de lait du Québec (PLQ), François Dumontier, prend ce résultat avec un grain de sel, soulignant qu’il ne s’agit pas d’un sondage scientifique. « Nous avons fait faire un vrai sondage par une firme professionnelle [en 2019 auprès de 1 300 personnes] et 97 % des Québécois ont dit consommer du lait chaque semaine et la grande majorité d’entre eux ont répondu qu’ils n’avaient pas l’intention de changer ces habitudes. Aussi, plus de 80 % considéraient les producteurs de lait du Québec comme respectueux de l’environnement », mentionne M. Dumontier, qui ajoute que les ventes de produits laitiers sont toujours en croissance. Cela dit, il affirme que les PLQ sont très attentifs à la hausse de popularité des boissons végétales et de toute la question environnementale. 

L’empreinte carbone des élevages a diminué

Le porte-parole des Producteurs de lait du Québec, François Dumontier, espère que Starbucks prendra en considération la différence entre les émissions polluantes des élevages laitiers canadiens et ceux de certains autres pays. « Au Québec, l’empreinte carbone des élevages laitiers a diminué de 8 % entre 2011 à 2016, en raison des avancées génétiques qui ont permis de réduire la taille des troupeaux [tout en augmentant la production de lait] », mentionne-t-il. M. Dumontier ajoute qu’il faut aussi calculer l’effet du remplacement des produits laitiers, en ce sens que le transport entraîne des émissions de CO2 qui doivent être évaluées, par exemple si on importe au Québec une boisson d’amandes provenant de la Californie.