Actualités 3 décembre 2019

Une saison écourtée pour le safran du Québec

Amorcée avec deux semaines de retard, la saison du safran a été écourtée par la neige hâtive. Selon les endroits, les producteurs auront eu trois ou quatre semaines de moins pour le récolter, soit la moitié moins que les six prévues.

« Dans le cas du safran, une saison qui commence plus tard, ça ne se rattrape pas, mais cette année, en plus, la neige est tombée beaucoup plus tôt, ce qui a inhibé la formation des fleurs », explique Micheline Sylvestre, d’Emporium Safran à Saint-Damien, dans Lanaudière.

Du côté du mont Saint-Bruno, la safranière Le Clan calcule avoir récolté la moitié moins de safran que l’an dernier. Safrana, située à Shawinigan, estime ses pertes à 75 %.

Rentabilité non démontrée

Depuis que la culture de cette plante issue de la Méditerranée a été implantée au Québec en 2012, sa rentabilité n’a pas été démontrée. Pour différentes raisons, entre autres un historique de données de production insuffisant et l’absence d’un regroupement officiel de producteurs, le safran n’est pas admissible à l’assurance récolte.

« La culture du safran est encore au stade expérimental. Il faut beaucoup de main-d’œuvre, car tout se fait à la main, de l’implantation des cormes à la cueillette des pistils. C’est une production qui coûte cher. Pour l’instant, personne n’en vit. Les producteurs doivent avoir une autre source de revenus, » explique Nicolas Autier, agronome à l’Institut québécois de développement de l’horticulture ornementale.

Isabelle Forgues, propriétaire de Safrana, se questionne : « Notre climat n’est pas tout à fait idéal pour le safran. Il faut encore trouver la bonne façon de le cultiver. Devrait-on utiliser des tunnels chenilles? Mais alors l’augmentation de la production serait-elle suffisante pour rentabiliser les coûts de matériel et d’installation? »

La fleur du Crocus sativus, dont les trois stigmates sont cueillis à la main pour composer le safran, a une végétation inversée. En dormance durant l’été, elle éclot quand la saison froide est imminente. Les cormes exigent une humidité restreinte ainsi qu’un sol riche et très bien drainé, idéalement calcaire, à plus de 23 °C durant 80 jours l’été pour stimuler la formation des fleurs.

En septembre 2019, 11 producteurs enregistrés au ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ) ont déclaré exploiter une safranière. « Toutefois, ce ne sont pas tous les exploitants qui sont enregistrés comme producteurs agricoles, dit Yohan Dallaire Boily, porte-parole du MAPAQ, qui estime plutôt leur nombre à 25.

À ce jour, aucune association de producteurs de safran n’a encore officiellement été créée. 

Geneviève Quessy, collaboration spéciale.