Politique 31 octobre 2019

Contre une politique d’égalité des genres à l’UPA

SAINTE-MARIE — Après plus d’une demi-heure de délibérations sur la place des femmes dans les instances de l’Union des producteurs agricoles (UPA), les 178 délégués présents à l’assemblée générale annuelle de la Fédération de l’UPA de la Chaudière-Appalaches ont presque unanimement rejeté la résolution voulant instaurer une politique d’égalité des genres au sein de la Confédération.

Dans sa forme originale, la résolution proposait de se doter d’une politique permettant d’atteindre un total de 30 % de femmes élues dans l’ensemble des instances de l’Union d’ici 2025. Une mesure qui n’a d’abord pas plu aux agricultrices elles-mêmes.

Dès la lecture de la résolution, Barbara Bourque s’est postée devant l’un des micros. « C’est bien de valeur, mais ce n’est pas parce qu’on a des seins qu’on n’est pas capables […] d’être assises autour d’une table avec des hommes pour débattre de nos arguments. […] Je n’en reviens pas. On est en 2019. Les femmes, ayez confiance en vous. Ayez confiance en vos idées, levez la main, et vous serez accueillies à bras ouverts autour des tables des conseils d’administration », a-t-elle affirmé, suscitant un tonnerre d’applaudissements dans la salle. La productrice Luce Bisson est du même avis. « Je suis déçue et gênée d’être une femme catégorisée de cette façon-là. Ça fait près de 30 ans que je suis à l’UPA et je n’ai jamais senti une différence entre ce que je disais moi et ce qu’un gars disait », a indiqué l’ancienne présidente de la Fédération de l’UPA de Lévis-Bellechasse.

Le débat aura néanmoins permis d’aborder des tabous, selon la productrice Luce Bisson.
Le débat aura néanmoins permis d’aborder des tabous, selon la productrice Luce Bisson.

Maria Gagnon s’est cependant dite désappointée de la tournure de la discussion. Cette politique a été proposée pour aider les plus timides et celles qui n’ont pas eu la chance de grandir dans un environnement où la liberté d’opinion primait, indépendamment des genres. « Il y en a pour qui s’impliquer et prendre leur place, c’est facile. Il y en a d’autres pour qui le pas est plus difficile et je pense que le but du syndicat des agricultrices est d’accompagner ces femmes-là qui ont besoin de moyens, de soutien et d’être encouragées pour prendre leur place », a souligné la productrice.

Si plusieurs femmes aux opinions divergentes se sont succédé au micro, les hommes qui ont osé prendre la parole avaient l’impression de marcher sur des œufs. « J’ai quasiment l’air d’un intrus, a déclaré Bertrand Boutin, causant l’hilarité dans la salle. J’ai sursauté en voyant la résolution. Je ne suis pas à l’aise de mettre un pourcentage, parce que même s’il y avait 100 % de femmes à l’UPA, ça ne me dérangerait pas du tout. On veut que la job soit faite. »

Le débat aura néanmoins permis d’aborder des tabous, a fait remarquer Luce Bisson. « Il s’est dit des choses ici, publiquement au micro, qui ne se disent qu’en coulisses, et […] c’est juste bon pour notre organisation », a-t-elle indiqué avant d’inviter les délégués à battre la résolution.

Le président de l’UPA, Marcel Groleau, n’a pu s’empêcher de revenir sur la question lors de son discours en fin d’assemblée. « Ouvrir la porte [aux femmes], c’est bien, mais une politique, c’est plus que ça. […] Si on veut que les femmes participent davantage, il faut trouver dans nos instances des façons de faciliter leur participation », a-t-il conclu.

Autres résolutions en bref

  • Financement de l’UPA : Les membres ont adopté à la majorité le plan de l’Union voulant qu’en moyenne, les cotisations augmentent de 2,66 %, et les contributions de 0,8 % par année;
  • Cotisation pour petites fermes : Les délégués ont majoritairement adopté une résolution voulant que l’UPA accorde le crédit de cotisation aux fermes ayant un revenu annuel de 50 000 $ au lieu de 25 000 $, comme c’est le cas actuellement, et ce, pour un maximum de 60 mois;
  • Projet de biométhanisation : Les membres ont adopté à l’unanimité une résolution voulant que la Fédération de l’UPA de la Chaudière-Appalaches poursuive ses démarches pour obtenir plus d’information sur l’utilisation des matières résiduelles de la future usine de biométhanisation sur les champs de la région, puisque cela affectera la capacité de disposition de phosphore.