Actualités 22 octobre 2019

Vers une certification d’ail québécois

« À la fruiterie du coin, je saute systématiquement sur l’ail du Québec », avoue Jean-Benoit Charron, chercheur à l’Université McGill. Avec la demande grandissante pour les produits du terroir, l’ail québécois est très prisé des consommateurs. Il se démarque par son goût, sa durée de conservation et sa faible teneur en pesticides. Pourtant, sa production demeure marginale. La raison : le manque de pureté des semences.

Caractériser les variétés d’ail est difficile. « Pour une même variété, avec les mêmes gènes, le produit diffère totalement suivant le site de culture, explique M. Charron. Par exemple, une même semence peut générer un gros bulbe blanc dans un type de sol et un bulbe plus petit et légèrement pourpre dans un autre. » L’identification visuelle n’est donc pas un outil adéquat pour assurer la pureté des variétés. D’ailleurs, selon une étude américaine, sur 350 à 400 variétés, près de la moitié sont en fait identiques.

Cette confusion constitue un frein au développement de la production d’ail au Québec. « Pour que l’industrie de la transformation s’y intéresse, les producteurs d’ail doivent répondre à certains critères de qualité et fournir des variétés bien caractérisées », insiste le chercheur. Actuellement, ils ne peuvent offrir cette garantie.

Identification des semences

Certains pays, comme la France, ont développé un système de certification des semences d’ail. « Les lots de semences peuvent être identifiés correctement. Les producteurs savent alors qu’il n’y a pas de mélange de variétés », souligne M. Charron, qui voudrait arriver au même résultat au Québec.

Grâce à l’étude en champs d’une quarantaine de variétés d’ail cultivées dans trois sites différents, le chercheur veut déterminer des caractéristiques visuelles fiables. Son équipe relève donc systématiquement plusieurs mesures comme la grandeur des plants, le nombre de feuilles, la couleur du bulbe ou encore son architecture. « Par exemple, si nous observons aux trois sites que les feuilles d’une variété bien précise jaunissent plus rapidement que les autres, nous saurons que nous avons un marqueur fiable qui ne varie pas selon les conditions de croissance. »

Pour distinguer les variétés d’ail, des tests génétiques sont également utilisés. « Nous étudions, entre autres, des marqueurs sur l’ADN appelés microsatellites », explique-t-il. Il s’agit de séquences répétées sur le génome, le nombre de répétitions fluctuant d’une variété à l’autre. En testant les 40 variétés d’ail, il est possible de déterminer si certaines sont similaires du point de vue génétique. En combinant ces résultats à l’identification visuelle, l’équipe de Jean-Benoit Charron espère donc développer un système de certification de l’ail de semence québécois.

Climat favorable au Saguenay–Lac-Saint-Jean

La région du Saguenay–Lac-Saint-Jean jouit d’un climat favorable à la production de semences d’ail. Puisque les terres sont situées loin des zones de production, la pression exercée sur celles-ci par les ravageurs, les agents fongiques et les pathogènes est moindre. Jean-Benoit Charron travaille d’ailleurs avec la direction régionale du ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ) et des entreprises de cette région sur le projet de certification des semences.

Kathleen Couillard, Agence Science-Presse