Politique 3 octobre 2019

Quel poids aura le vote agricole québécois?

Jusqu’aux élections du 21 octobre, des experts approchés par La Terre analysent d’un point de vue agricole les promesses et les rebondissements de cette course.

Si l’on s’en tient strictement aux chiffres, le vote agricole n’aura pas une grande portée sur le plan national, estime le chargé de cours à l’Université McGill et économiste Pascal Thériault. Le constat est le même du côté de l’agriculteur Kevin Richard, également professeur en agroéconomie à l’Institut de technologie agroalimentaire : « Les producteurs représentent moins de 1 % des électeurs. Donc, selon moi, ça aura peu d’influence », dit-il.

Le vote agricole québécois fera cependant une différence dans les comtés ruraux. « À travers le pays, la plupart des producteurs des autres provinces s’entendent pour dire que le Québec a une capacité de mobilisation agricole importante et respectée. Je pense que ce sera important que les politiciens, s’ils veulent avoir de l’exposure rural, convainquent les agriculteurs québécois que [leurs enjeux sont] importants », souligne-t-il.

Montée du Bloc

Selon un récent sondage de Léger, le Bloc québécois (BQ) arriverait en tête dans la province avec 29 % des intentions de vote. Le parti tente de courtiser les producteurs depuis le début de la campagne et ça semble fonctionner, remarque pour sa part le professeur Rémy Lambert, de l’Université Laval. « Historiquement, le Bloc a connu des succès dans les comtés ruraux, donc c’est certain que s’ils ont des gains à faire, c’est à ce niveau-là », affirme-t-il, prédisant même que le Bloc ravira des votes à Maxime Bernier en Beauce, une région où le combat des producteurs pourra influencer le vote.

Pascal Thériault ne s’attend pas à ce que le Parti conservateur ravisse énormément de sièges au Québec, mais estime que le Nouveau Parti démocratique (NPD) pourrait en perdre au profit du BQ. Même une candidate comme Ruth Ellen Brosseau, du NPD, pourtant proche du monde agricole, pourrait être en danger dans son comté, selon Pascal Thériault. « Est-ce que ça va permettre à d’autres partis de se faufiler? Ça se peut qu’on ait des surprises s’il y a de la division de votes », dit-il

Le Bloc peut bien représenter le Québec, mais le parti ne formera pas le prochain gouvernement, nuance Kevin Richard. « Jusqu’à quel point il influencera les décisions à Ottawa au parlement? Ça reste à voir », conclut-il.

Nos experts

Rémy Lambert est professeur titulaire à la Faculté des sciences de l’agriculture et de l’alimentation de l’Université Laval. Il est aussi directeur fondateur du Centre de recherche en économie agroalimentaire (CRÉA), aujourd’hui connu sous le nom de CREATE.

Pascal Thériault est économiste et agronome de formation. Il occupe le poste de chargé de cours et celui de directeur des relations communautaires à la Faculté des sciences de l’agriculture et de l’environnement de l’Université McGill.

Kevin Richard est professeur en agroéconomie à l’Institut de technologie agroalimentaire (ITA), campus de Saint-Hyacinthe. Agroéconomiste de formation, il est aussi producteur et président de l’Association de la relève agricole de la Montérégie-Est.