À coeur ouvert 27 février 2019

L’homosexualité à la ferme : en parler ou non?

Connaître une personne homosexuelle est de plus en plus commun. Si certaines s’affichent publiquement, d’autres ont choisi d’être plus discrètes sur leur vie privée. C’est le cas de Carl, un producteur gai. L’homme a décidé de ne pas dévoiler son homosexualité à ses collègues. Pourquoi, en 2019, préférer le silence sur son orientation sexuelle?

« L’agriculture, c’est un monde de machos, un milieu conservateur. Ce n’est pas tout le monde qui est prêt à entendre que je suis en couple avec un homme », explique Carl, qui avoue également détourner la question lorsqu’on lui demande s’il a une blonde. « Je réponds que non. C’est plus simple pour moi et ça évite bien des malaises. Ma famille et mes amis proches sont au courant que j’ai un conjoint. Ça se limite à ça », précise-t-il. Pour éviter d’avoir à endurer les commérages et à se justifier tout le temps, Carl a choisi d’être « un heureux célibataire » aux yeux de ses connaissances.

L’agriculture est un petit milieu où tout se sait rapidement. Au fil du temps, Carl a été témoin de commentaires irrespectueux, de mauvaises blagues et de propos déplacés surde la part de ses confrères. Pour lui, cela n’a fait que confirmer qu’il a bien fait de ne pas se confier sur sa vie privée à n’importe qui. « Le jugement des autres peut parfois faire mal. Pour cette raison, je n’en parle pas », raconte-t-il. C’est d’abord pour se protéger lui-même que Carl a fait ce choix. Son conjoint le comprend et est à l’aise avec ce silence.

Pour conserver cette partie intime de sa vie, Carl va jusqu’à ne pas accepter certaines demandes d’amitié sur les réseaux sociaux. Lors du décès d’un membre de sa famille, il a même volontairement décidé de ne pas écrire le nom de son conjoint dans la liste des personnes endeuillées. « J’ai fait ça pour éviter que les gens se concentrent seulement sur cet aspect », souligne l’homme.

Une maman d’agriculteur ajoute un autre témoignage à ce sujet. En parlant de son fils gai, elle aussi craint « le jugement des autres, le regard qu’ils vont porter sur lui ». Pour elle, c’est son garçon, tout simplement, gai ou pas. « Apprendre que mon fils était gai n’a rien changé. Je veux qu’il soit heureux », confie-t-elle. Le reste ne lui appartient pas, selon elle. Bien sûr, cette productrice à la retraite a eu des deuils à faire. Elle a aussi dû lâcher prise. « Je me demandais pourquoi il était comme ça, ce que j’avais fait de mal. Mon garçon m’a rassuré. Il est juste différent. J’ai bien fait ma job de mère », précise-t-elle en souriant.

Obtenir de l’aide

L’association Fierté agricole écoute et conseille les productrices et les producteurs qui souhaitent discuter de leur homosexualité en toute confiance. Si une personne désire faire son coming out, il n’y a pas de secret : la première étape de cette importante annonce est l’acceptation de soi. « Il faut vraiment être prêt », rapporte l’un des membres de l’organisme. De plus, différentes activités sont mises sur pied un peu partout dans la province pour faciliter les échanges entre personnes lesbiennes, gaies, bisexuelles et trans (LGBT) vivant dans un contexte agricole. S’afficher ou non reste aussi un choix personnel. Carl a décidé de garder le silence, alors que le fils de l’agricultrice en a parlé. L’important est de s’écouter soi-même et d’être bien avec sa décision.

Fierté agricole
fierteagricole.org/fr
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