À coeur ouvert 13 février 2019

Quand de « vrais » gars sont fiers de demander de l’aide

Francis, un producteur de veaux, nous a écrit pour témoigner des bienfaits de consulter lorsqu’on traverse une période difficile. Il n’y a pas si longtemps, il n’aurait jamais osé exprimer son désarroi ou même mentionner qu’il avait demandé de l’aide, par crainte de passer pour un « faible ». 

En 2006, des agriculteurs rencontrés lors d’une enquête étaient presque unanimes : ils n’utiliseraient pas les services d’aide existants, même s’ils étaient fortement stressés et qu’ils n’allaient pas bien du tout. Voici ce qu’on entendait à l’époque : « On a notre orgueil, notre fierté personnelle. Il ne faut pas montrer une faiblesse. » « Si on a un problème, on va essayer de le régler nous-mêmes. » « On ne veut pas que ça se sache. » « Un homme, ça ne braille pas, ça ne s’ouvre pas aux autres. » « T’as pas besoin d’aller consulter, t’es capable de t’en sortir tout seul. » « Admettons que t’es vraiment découragé de la vie. Tu finis ça là. Tu ne passes pas ton temps à jaser de ça. Moi, je n’irais pas m’ouvrir. »

Aujourd’hui, le discours des producteurs est différent. Ils avouent sans honte avoir choisi de demander de l’aide plutôt que de s’isoler et de s’en faire tout seuls dans leur coin. Francis est de ceux-là. Il a vécu des moments pénibles. Il écrit : « Le domaine agricole apporte souvent de l’insécurité, de l’inquiétude, du stress et de l’anxiété. Il est difficile de s’offrir une stabilité lorsque le secteur est constamment en mouvement. » Quand il s’est retrouvé dans une impasse, Francis, qui se décrit comme « un dur qui travaille des heures et des heures », a pris le temps de faire appel au service de travailleurs de rang proposé par l’organisme Au cœur des familles agricoles (ACFA), dont la mission, qui vise à améliorer le bien-être des gens du milieu, lui inspirait confiance.

Les rencontres avec une travailleuse de rang lui ont permis de réfléchir sur ses méthodes et sur lui-même, et de cheminer dans la bonne voie. Comme il le confie, ça lui a donné la possibilité d’atteindre « un équilibre de vie plus acceptable sans toutefois négliger les tâches à réaliser ».

D’autres agriculteurs disent ouvertement avoir fait appel à un psychologue, à un travailleur de rang ou à un autre intervenant. Ces consultations leur permettent de prendre du recul sur leur situation, de songer à des solutions, d’améliorer leur bien-être, de recoller des morceaux, et même, d’être encore en vie. Ils constatent des bénéfices autant sur le plan individuel qu’au sein de leur entreprise.

Cependant, il y a plusieurs producteurs pour qui le recours à des services d’aide est impensable. Les gens qui sont les plus susceptibles de refuser toute forme d’aide sont ceux qui adhèrent le plus fortement au modèle traditionnel de la masculinité. Ce sont ceux qui croient que les « vrais » hommes se débrouillent seuls, qu’ils sont endurcis et qu’ils ne doivent rien laisser paraître. Lorsqu’une personne a été élevée de cette façon, le pas à franchir pour demander de l’aide peut être plus ardu. Il faut toutefois mettre son orgueil de côté et vaincre la honte et la peur du jugement. 

Francis encourage ses pairs : « Les services d’ACFA sont là pour nous, agriculteurs. Nous éprouvons des émotions en plus de diriger une entreprise qui nous tient à cœur. Nous méritons donc de nous donner le droit de prendre soin de nous et de nous dire que, malgré tout, nous sommes humains. »  

Au cœur des familles agricoles : 450 768-6995