Actualités 2 octobre 2018

Des stimulateurs de croissance inspirés de la nature

Quand on questionne le chercheur Donald L. Smith sur l’impact des changements climatiques sur l’agriculture, il commence par raconter l’histoire populaire du roi Knut qui, il y a plus d’un millénaire, avait fait installer son trône au bord de la mer pour prouver à ses courtisans que même la royauté ne pouvait empêcher la marée de monter.

« C’est la même chose avec les conditions climatiques, soutient le professeur du Département des sciences végétales de l’Université McGill. Qu’on le veuille ou non, le climat change et affectera nos façons de produire nos cultures. Les agriculteurs doivent s’y préparer et s’adapter. »

Selon les endroits, il fait plus chaud, mais aussi plus sec. C’est déjà le cas en Californie. Donald Smith prévoit d’ailleurs une sorte de guerre de l’eau dans les prochaines années entre les pays. En conséquence, les producteurs devront apprendre à mieux gérer l’utilisation de l’or bleu, tout en augmentant leur production pour nourrir la population grandissante.

Pour les aider à relever ce défi, le chercheur a développé des stimulateurs de croissance inspirés de la nature. Il s’agit en fait de molécules chimiques issues des plantes ou des bactéries. « Depuis des millions d’années, les plantes et les bactéries du sol évoluent en s’aidant mutuellement à s’adapter à l’environnement. Ensemble, elles s’échangent des messages, sous forme de molécules chimiques, qui permettent notamment d’activer leur croissance sous certains stress, par exemple, lors d’une pénurie d’eau. »

Messages décodés

C’est en étudiant des problèmes de culture du soya au Québec que son équipe et lui ont réussi à décoder certains de ces messages et à isoler deux molécules qui agissent à la manière d’hormones de croissance. Après avoir développé un procédé novateur pour produire celles-ci en grande quantité en laboratoire et entrepris des essais aux champs, ils se sont aperçus que ces deux molécules stimulaient grandement la croissance de plusieurs types de plantes, particulièrement lorsque ces dernières étaient soumises à des stress tels que le sel, la chaleur extrême et la sécheresse. Fait intéressant, l’épandage en faible concentration de ces molécules permet d’obtenir un bon rendement à prix économique.
« Nous commençons seulement à découvrir le potentiel des molécules chimiques sécrétées par les plantes et les bactéries. Je suis certain que nous trouverons d’autres molécules qui pourront aider les agriculteurs à produire davantage tout en s’adaptant aux changements climatiques », conclut M. Smith.  

Communication brisée

Si le soya croît difficilement sous les 25 °C, c’est en raison des échanges qui se font moins bien entre la plante et les bactéries présentes dans le sol à cette température, a constaté le chercheur Donald L. Smith. 

Nathalie Kinnard, Agence Science-Presse