Actualités 18 juillet 2018

Quand la santé prend le champ

L’instabilité du climat représente généralement le pire ennemi des agriculteurs, mais les caprices de dame Nature deviennent bien secondaires lorsque la maladie frappe brusquement au détour.

SAINT-AMBROISE-DE-KILDARE — Avant de pénétrer dans l’étable, Jean-Guy Bouvier enfile un masque à poussière et s’assure d’avoir une pompe sur lui. Un rituel qu’il respecte depuis déjà plus de 10 ans, soit depuis qu’il combat un asthme chronique, résultat d’une sévère pneumonie contractée à la fin de l’été 2001.

L’agriculteur de Saint-Ambroise-de-Kildare, dans la région de Lanaudière, se remémore avec difficulté cette période où il a bien failli tout abandonner. « J’étais tellement faible qu’un enfant de 10 ans aurait été capable de me donner une volée », raconte l’homme qui, malgré ses 71 ans, impressionne par ses capacités physiques.

Période difficile

Durant près de trois semaines, Jean-Guy Bouvier est resté alité. Plutôt inhabituel pour cet homme robuste au début de la cinquantaine, qui ne s’alimentait presque plus. À l’urgence, les médecins croyaient qu’il s’agissait d’une vilaine grippe qui finirait par passer. « La dernière fois que j’y suis allé, je leur ai dit que je ne partirais pas, tant qu’on n’aurait pas trouvé ce que j’avais », raconte l’agriculteur. Son obstination finit par rapporter : un pneumologue lui diagnostique une pneumonie à éosinophiles, une maladie qui lui laisse les poumons tachetés comme un dalmatien, mais surtout, une fatigue chronique.

S’amorce alors une traversée du désert qui durera cinq années et au cours de laquelle il participera à peine aux activités de la ferme menées par son fils Marco et sa conjointe. « J’étais juste pas capable », confie-t-il. À cette époque, le pneumologue lui prescrit des doses quotidiennes de 50 à 60 mg de cortisone, un remède de cheval. « Je devais prendre ma tasse de café à deux mains tellement je tremblais. »

Jean-Guy Bouvier, ici en compagnie de son petit-fils Anthony et de son fils Marco, a adapté ses méthodes de travail à sa condition d’asthmatique. Photo : Bernard Lepage
Jean-Guy Bouvier, ici en compagnie de son petit-fils Anthony et de son fils Marco, a adapté ses méthodes de travail à sa condition d’asthmatique. Photo : Bernard Lepage

Après cinq ans de traitement, durant lesquels son moral est mis durement à l’épreuve, Jean-Guy Bouvier vient finalement à bout de sa pneumonie, mais l’asthme chronique qu’il a développé entre-temps amène son pneumologue à lui suggérer d’abandonner l’agriculture – un milieu propice à la poussière s’il en est un – ou bien de revoir ses habitudes de travail.

Du déjà vu pour lui. Élevé dans une ferme en Montérégie, il avait d’abord choisi de devenir opérateur de machinerie lourde. À la fin de la trentaine, le voyant amoindri physiquement par les exigences de son travail, son neurologue lui conseille… de changer de métier. Comme son fils avait un intérêt pour l’agriculture, Jean-Guy Bouvier décide d’écouter son médecin en acquérant une exploitation près de Joliette au début des années 1990.

Le revoilà 15 ans plus tard avec le même dilemme. « J’ai dit à mon pneumologue : Moi, je sauve ma peau. Dis-moi quoi faire pis je vais le faire. » Le spécialiste lui recommande de ne plus travailler à l’intérieur des bâtiments et de ne négliger aucune précaution. « J’ai laissé le choix à mon fils et à ma bru : si vous voulez continuer, on continue, mais plus comme avant. La première année, tout le monde a mis la main à la pâte pour trouver les bons ajustements. Ça marche encore très bien aujourd’hui », conclut-il.

Bernard Lepage, collaboration spéciale

 

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