Actualités 17 juillet 2018

Sécheresse : le moral des producteurs baisse et le prix du foin monte

Le temps sec qui prévaut depuis un moment affecte gravement les récoltes de plantes fourragères dans plusieurs régions, ce qui entraîne une hausse du prix du foin. Des producteurs qualifient déjà la situation de catastrophique et l’Union des producteurs agricoles (UPA) réclame l’intervention de Québec.

Une balle de foin… à l’acre

C’est le Bas-Saint-Laurent qui semble la région la plus durement touchée, d’après les informations colligées par La Terre. L’ensemble du territoire est sévèrement frappé par la sécheresse. « Nous avons de 30 à 40 % moins de rendement pour notre 1re coupe et 75 % de moins pour la 2e. C’est un peu moins qu’une balle de foin à l’acre! Dans nos terres de sable, les plantes sont brûlées. C’est catastrophique », témoigne Pascal Pelletier, dont la ferme laitière est située près de La Pocatière.

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Une fois récoltée, la base des plantes témoigne du temps sec. Photo : Gracieuseté de Pascal Pelletier

L’entreprise sous régie biologique est habituellement autosuffisante. Or, la sécheresse de l’an dernier suivie de celle de cette année a épuisé les réserves. Les producteurs se tournent vers d’autres régions, mais dans les circonstances le foin est rare, ce qui en fait pratiquement doubler le prix, révèle M. Pelletier. Finalement, sa famille et lui devront acheter entre 80 000 $ et 100 000 $ de foin biologique pour nourrir leur troupeau de 100 vaches en lactation.

Heureusement, leur assurance récolte devrait couvrir une partie des coûts. À ce sujet, le bureau de Rimouski de La Financière agricole du Québec (FADQ) affirme recevoir plusieurs appels de producteurs qui lui signalent des pertes élevées. 

Le directeur Jean Ruest confirme à La Terre que les producteurs auront droit à une avance pour couvrir leurs pertes. Il s’agit d’une mesure exceptionnelle appliquée pour une 2e année de suite dans ce secteur. M. Ruest rappelle que la Financière a versé 6,7 M$ l’an dernier aux agriculteurs du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie pour les pertes de foin, un montant qui pourrait être encore plus élevé cette année.

Des balles au double du prix

Au Lac-Saint-Jean, près de Chicoutimi, le producteur vache-veau François Gobeil vient de terminer sa 1re coupe avec une baisse de rendement de 60 %. « On cherche déjà du foin. J’en ai trouvé, mais le producteur demande 90 $ la balle ronde. Disons que ça m’a breaké un peu. Habituellement, on paye 35 à 40 $ la balle. Si on ne trouve pas de foin, il va falloir vendre une partie du troupeau », estime celui qui possède près de 500 têtes.

Mieux en Montérégie

Près de Saint-Hyacinthe, Jean Laliberté amorce la 2e coupe malgré les faibles volumes. « La plante est en fleurs. Il faut faucher, même si dans certains champs les rendements seront exécrables », relève-t-il. Il nuance toutefois ses propos en précisant que certains champs « ne sont pas si mal ». Il constate une hausse de prix de 10 $ la grosse balle de foin enrobée.

À Saint-Clet, en Montérégie-Ouest, Vital Bourbonnais affirme que « la 2e coupe cette année est catastrophique ». L’agriculteur craint de perdre jusqu’à 50 % de sa production pour cette coupe, principalement parce que les graminées n’ont pas poussé et que la luzerne, à sa 2e année, est moins prolifique. M. Bourbonnais prédit une augmentation des prix d’environ 10 % sur les balles de foin dans sa région.

Plus chanceux en Estrie

L’Estrie semble la seule région à bien performer. Dany Therrien, producteur de foin de commerce de Sherbrooke, signale que la situation s’est replacée. « Quand on a commencé à la mi-juin, les plantes avaient manqué de chaleur et d’eau. Mais on a eu de la pluie et on termine la 1re coupe avec des rendements légèrement plus élevés que l’an passé. La 2e coupe s’annonce bonne », observe-t-il.

Paiements anticipés demandés

Le président de l’UPA, Marcel Groleau, interpellera le ministre de l’Agriculture, Laurent Lessard, le 18 juillet à Vancouver, entre autres sur la question de la sécheresse qui prévaut au Québec.

Dans une lettre adressée au ministre deux jours plus tôt, Marcel Groleau demandait déjà à ce que la FADQ anticipe les paiements dans les différents programmes d’assurance récolte. La Financière a indiqué à La Terre que l’analyse des données de la 1re coupe permettra à l’organisme de statuer sur une éventuelle avance de compensation.

Tout se jouera dans la 3e coupe et la récolte de l’Ouest

David Normandin et sa famille commercialisent de grands volumes de foin. La situation actuelle crée un gonflement des prix. Les agriculteurs qui l’approvisionnent exigent un prix de 10 à 15 % plus élevé que l’an dernier. Les prochaines semaines seront critiques, atteste M. Normandin. « Si les volumes de la 3e coupe se révèlent insuffisants et que les producteurs de l’Ouest canadien connaissent eux aussi des conditions moins propices à la culture de foin comme c’est le cas présentement, le prix pourrait grimper », estime-t-il.

Avec la collaboration de Myriam Laplante El Haïli