International 10 mai 2018

Gestion de l’offre : Des envieux aux États-Unis

Aux États-Unis, de plus en plus de producteurs de lait regardent avec envie le système de gestion de l’offre dont profitent leurs confrères canadiens.

Le mouvement réclamant un meilleur arrimage entre la production laitière et les besoins du marché gagne du terrain au sud de la frontière. En mars, des représentants des Dairy Farmers of Ontario (DFO) se sont même rendus au Wisconsin – le bassin laitier des États-Unis – afin de rencontrer des producteurs et de répondre à leurs questions concernant la gestion de l’offre. Le président et le vice-président des DFO, Ralph Dietrich et Murray Sherk, ont littéralement fait salle comble lors de cette tournée de cinq villes appelée Dairy Together et organisée par la Wisconsin Farmers Union (WFU), explique Nick Thurler, membre du conseil d’administration des DFO.

Lors des rencontres, MM. Dietrich et Sherk ont d’abord rappelé le contexte historique derrière la mise en place de la gestion de l’offre au Canada alors que dans les années 1960, le secteur faisait face à des surplus de production et à des prix fortement déprimés. La même situation prévaut actuellement aux États-Unis.

Chiffres à l’appui, les deux éleveurs ont démontré l’extrême volatilité des prix du lait aux États-Unis en comparaison du marché canadien. Ils en ont également profité pour déboulonner certains mythes, dont celui voulant que cette politique canadienne soit responsable des surplus des producteurs américains. Maintenant que les deux producteurs ont regagné le Canada, la WFU continue sa tournée d’information en diffusant une présentation vidéo tirée de leur conférence.

En pleine crise

Au Wisconsin, connu comme le « Dairyland » de l’Amérique, la disparition croissante de fermes laitières est devenue un sujet de préoccupation. Les chiffres du département de l’Agriculture de l’État démontrent que 500 entreprises ont cessé leurs activités en 2017, soit une moyenne de plus d’une ferme par jour, fait valoir le président de la WFU, Darin Von Ruden. En comparaison, la production canadienne est en croissance. Au Québec seulement, les livraisons quotidiennes de lait sont en hausse de 10 % depuis 2015, démontre le bilan annuel des Producteurs de lait du Québec.

Vague de mécontentement

Pour la Wisconsin Farmers Union, le statu quo n’est pas viable. Même la Wisconsin Farm Bureau Federation, traditionnellement en faveur du libre marché, s’est jointe à la réflexion sur l’avenir de la production laitière. De plus, dans une lettre acheminée au Congrès, une cinquantaine d’organisations réclament la mise en place d’une gestion de l’offre en sol américain.

Lors de l’assemblée annuelle de Dairy Farmers of America, la plus grande coopérative laitière du pays, ses délégués ont adopté une résolution demandant à leurs dirigeants d’évaluer la mise en place d’un système afin de mieux équilibrer l’offre et la demande, a confirmé à La Terre la porte-parole de l’entreprise. « Tout le monde sait que les Américains ne mettront pas en place une gestion de l’offre, mais notre gouvernement peut utiliser leur réflexion comme un argument pour la renégociation de l’Accord de libre-échange nord-américain », suggère pour sa part Nick Thurler.