À coeur ouvert 25 avril 2018

Brûlé progressivement par le travail

« Les gens sont parfois victimes d’incendie, tout comme les immeubles. Sous la tension produite par la vie dans notre monde complexe, leurs ressources internes en viennent à se consumer, comme sous l’action des flammes. » C’est ainsi que le psychiatre Herbert Freudenberger décrivait en 1974 l’épuisement professionnel, qu’il nommait burnout. Selon des études récentes en France, en Suisse et au Canada anglais, les agriculteurs ne sont pas épargnés par ce phénomène, loin de là. 

Voici l’exemple d’un producteur laitier brûlé progressivement par le travail : 

coeur_ouvert« Nous avions décidé, ma conjointe et moi, que nous allions investir dans une nouvelle étable avec robot de traite. Nous voulions améliorer notre qualité de vie et offrir une entreprise intéressante à notre relève. Nous avons engagé des hommes pour commencer le projet de construction et j’ai poursuivi avec mon père et mon fils. Nous avons construit à travers les semences, les récoltes et l’ouvrage quotidien. Les journées débutaient très tôt le matin et se terminaient très tard le soir. Je me couchais 3-4 heures et je recommençais le lendemain. Parfois, j’allais au lit seulement pour pouvoir réfléchir sur le plan de la journée suivante. Je travaillais sans limites comme si j’avais 20 ans. Ma femme me disait de slaquer sur l’ouvrage, mais je ne l’écoutais pas. 

« Je me mettais une énorme pression; je voulais que tout soit bien fait. Pas question de botcher la job! Je frustrais parce qu’on n’accordait pas tous la même importance à la qualité du travail. Le train quotidien devait aussi continuer à se faire pendant ce temps-là. J’avais de plus en plus de misère à dormir…

« La finition de l’étable traînait. Nous venions de nous endetter pour plusieurs années. J’angoissais. J’étais en maudit après tout le monde. J’étais fatigué, stressé, j’avais mal à la tête et à l’estomac. J’avais la mèche de plus en courte. Les relations se sont détériorées avec mon père et mon fils. J’avais envie de me soûler.

« À la fin, j’étais fatigué en me levant et j’étais découragé. On ne trayait plus les vaches, mais il y avait autant d’ouvrage qui nous attendait. Moi qui étais un producteur passionné, ça me levait le cœur d’entendre les mots production laitière. Tout était devenu énorme pour moi. Je n’étais plus capable de prendre une décision, j’étais juste complètement à terre, physiquement et mentalement. Je me sentais un moins que rien. J’avais brûlé toutes mes réserves… »

Vouloir tout faire soi-même peut permettre d’économiser de l’argent à court terme, mais on n’est pas gagnant si on y laisse sa santé et qu’on est obligé d’arrêter pour recharger ses ­batteries complètement à plat. 

L’exemple de ce producteur nous rappelle combien il est important de ne pas brûler la chandelle par les deux bouts pour éviter d’entrer dans le cycle de l’épuisement.

Quelques conseils préventifs

  • Ces quelques conseils pourraient en aider certains à ne pas se laisser consumer par le travail :
  • Prendre conscience des objectifs irréalistes et du travail excessif que l’on s’impose parfois à soi-même; 
  • Apprendre à se fixer des limites… et à les respecter; 
  • Ne pas se croire indispensable. Comme le dit la célèbre phrase : « Les cimetières sont pleins de gens irremplaçables, qui ont tous été remplacés »; 
  • Accepter de reporter les tâches qui ne sont pas urgentes; 
  • Apprendre à déléguer;
  • Essayer de se déconnecter, de mettre le piton à off de temps en temps;
  • Avoir une vie plus équilibrée, s’accorder du temps libre pour soi, pour son couple et pour sa famille.