International 19 mars 2018

La renégociation vue par le négociateur agricole canadien

OTTAWA — Il est rare que l’on puisse entendre publiquement le négociateur agricole canadien en pleine négociation d’un accord commercial.

Acteur de premier plan dans le dossier de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA), Denis Landreville était justement devant la Société canadienne d’agroéconomie, le 25 janvier, alors que la 6e ronde des pourparlers se poursuivait à Montréal sur d’autres sujets.

Modernisation nécessaire

« L’ALENA ne ressemble pas à nos plus récents accords », a affirmé Denis Landreville, ajoutant que la modernisation de cette entente de 1994 devenait nécessaire même si les échanges agricoles ont presque quadruplé en 25 ans et que les chaînes de production sont maintenant « hautement intégrées ».

Selon le négociateur, les objectifs du Canada sont de rendre l’ALENA plus « progressif », d’harmoniser et de simplifier les règles, de mettre en place un marché des contrats publics plus ouvert, de faciliter les déplacements pour les professionnels et de conserver des « éléments clés de l’intérêt national » comme la gestion de l’offre. « On ne doit pas reculer, on doit faire avancer le commerce agricole », estimait Denis Landreville.

Ce dernier était également d’avis que la dynamique de cette négociation « non orthodoxe » avec les États-Unis pourrait changer après la 6e ronde puisqu’il risquerait de manquer de sujets plus faciles à négocier par la suite. Selon lui, l’échéance des élections mexicaines du 1er juillet et des élections de mi-mandat aux États-Unis le 6 novembre pourrait également jouer. Le 17 juillet, le gouvernement Trump devra par ailleurs renouveler le « fast track » auprès du Congrès de façon à pouvoir négocier sans devoir obtenir l’accord des élus américains sur chaque sujet abordé.

Alliés mexicains

Denis Landreville a constaté un certain « alignement » des positions canadiennes et mexicaines sur les points principaux (big picture). Cependant, le Mexique a déjà affirmé qu’il se retirerait de la table de négociation si le président Donald Trump annonçait l’intention de son pays de quitter l’ALENA après un avis de six mois. Le Canada serait alors en position plus difficile.

Retrait coûteux 

« On peut vivre sans ALENA en agriculture, mais c’est le secteur américain qui en souffrirait le plus », a pour sa part soutenu Mike Gifford, ancien négociateur agricole canadien. Il croit qu’un accord est dans l’intérêt du secteur agricole des trois pays. Les tarifs en vertu de l’accord de l’Organisation mondiale du commerce sont généralement faibles. Mike Gifford a aussi affirmé qu’il s’attendait à ce que le Canada doive céder de nouvelles parts de marché pour les secteurs sous gestion de l’offre afin de conclure l’ALENA. « La seule question, c’est combien », a-t-il ajouté.