À coeur ouvert 14 mars 2018

Quand la maladie nous oblige à nous choisir

Vous êtes-vous déjà demandé ce que vous feriez si, soudainement, on vous apprenait que vous étiez gravement malade? Est-ce que vous penseriez à vous, à votre guérison ou uniquement à votre ferme?

Vous le savez, l’entreprise est régulièrement au sommet des priorités de l’agriculteur. Cette semaine, nous présentons le témoignage d’un producteur de lait qui a toujours fait passer ses vaches avant lui, jusqu’au jour où le cancer l’a obligé à se placer au premier rang de ses priorités.

coeur_ouvertCependant, cela ne s’est pas fait instantanément à l’annonce du diagnostic de cancer à l’estomac. Non, ce n’est pas pour lui qu’il s’est d’abord inquiété. Il n’a même pas posé de questions au médecin sur ce qui allait lui arriver, le genre de traitements, ni le pronostic. « Qu’est-ce que je vais faire avec les vaches et la ferme? » Voilà ce pour quoi il s’en faisait. C’est ce qui était le plus stressant pour lui. « Moi, c’était secondaire », dit-il. Il s’oubliait, même dans la maladie. « Ça n’a pas de bon sens. Je n’ai même pas pensé à moi », confie-t-il maintenant avec du recul.

La chimio qui réveille

C’est lorsqu’on lui a parlé de traitements de chimiothérapie qu’il a commencé à réaliser ce qui lui arrivait. Lui qui s’était toujours occupé seul de sa ferme devait trouver un employé pour le remplacer. Pendant les traitements, il n’a guère eu l’énergie pour ruminer ni stresser. Par contre, après ceux-ci, il s’est mis à se questionner et à être inquiet. Il raconte : « Comme j’étais habitué à tout faire par moi-même et que je ne suis pas du genre à déléguer facilement mes affaires, ça venait trop me chercher. Je ne pouvais pas gérer mon entreprise de A à Z. Je trouvais ça de plus en plus difficile de ne pas être là. Je me sentais coupable de ne pas faire mon ouvrage. » Il était incapable de lâcher prise. Une troisième opération en quelques mois et la perspective d’autres traitements de chimio l’ont finalement obligé à penser à lui. Mais « ce n’est pas évident quand ta vie a toujours été centrée sur le travail, sept jours sur sept ».

Il a vendu son troupeau, la décision la plus difficile de sa vie, et a mis son quota en location pour deux ans. Maintenant, il profite de la vie. Il prend le temps de réfléchir à l’avenir. Il a compris qu’il pouvait se choisir d’abord et avant tout. « Ce gros bouleversement m’a finalement fait réaliser que je n’avais jamais vraiment pensé à moi. Avant, je vivais seulement pour l’entreprise. Aujourd’hui, je vis pour moi! Je m’ennuie parfois de la ferme, mais ce n’est pas majeur. J’étais sans doute rendu là sans le savoir. »

Durant cette période de fortes turbulences, il a vécu de vives émotions. Lui qui n’avait jamais souffert d’insomnie ne parvenait plus à dormir et était vraiment stressé. C’est alors qu’il a fait appel à une travailleuse de rang pour l’aider à traverser les étapes plus difficiles, telles que des annonces qu’il n’arrivait pas à faire et la vente du troupeau dont il n’avait pas la force de s’occuper. Il confie que durant toute cette période tumultueuse, il n’y a que de bonnes personnes qui ont été mises sur son chemin, et qu’aucun producteur agricole ne devrait se priver des services d’un travailleur de rang.