Économie 11 mai 2022

Un prix fixé pour le lisier de porc dans Chaudière-Appalaches

Quel devrait être le juste prix pour le lisier de porc? Des éleveurs de la région de Chaudière-Appalaches ont mandaté une agronome afin de mieux évaluer la valeur fertilisante en azote, en phosphore et en potassium du produit.

Clément Nadeau
Clément Nadeau. Photo : Archives / TCN

Leur objectif est de pouvoir comparer ses éléments fertilisants avec ceux de l’engrais chimique pour fixer un prix de base. « Quand les élevages se sont développés en grand nombre dans les années 1990 dans notre secteur, la production porcine était très payante et on donnait le lisier. On allait même jusqu’à l’épandre gratuitement [chez le producteur-receveur], confie Clément Nadeau, propriétaire d’engraissements porcins à Sainte-Claire et à Sainte-Marguerite. Ce n’est donc pas facile de faire payer un produit que des producteurs de grandes cultures ont toujours eu gratuitement. Mais en connaissant mieux sa valeur fertilisante, on a plus d’arguments pour justifier le prix », espère-t-il.

En se basant sur les données agronomiques, le groupe de producteurs a évalué que 7 000 gallons de lisier de porc [l’équivalent d’un camion semi-remorque] équivalaient à environ 550 $ de fertilisant chimique. « En discutant avec nos receveurs, on a réussi à fixer un prix de 50 $ pour 7 000 gallons livrés dans un rayon de 3 ou 5 km, en ajustant le prix selon la distance et les services comme l’épandage », précise M. Nadeau, ajoutant que 80 % des receveurs consultés ont accepté cette entente. « C’est un prix bien plus bas [que l’engrais chimique], mais c’est un départ et on pourra se réajuster dans les prochaines années », ajoute-t-il.

Un site Web établissant les prix du groupe de Chaudière-Appalaches est d’ailleurs en préparation, mentionne Clément Nadeau, pour que tous les producteurs de la région puissent s’y référer.

Kathryn Vachon
Kathryn Vachon

Des engrais répondant à des besoins différents

L’agronome Kathryn Vachon, de la Coop de fertilisation organique Fertior, a travaillé avec le groupe de producteurs porcins de Chaudière-Appalaches pour les aider à évaluer la valeur fertilisante du lisier de porc. Selon elle, malgré cette valeur, il est ardu d’établir un prix qui serait seulement basé sur son « équivalent chimique », puisque les deux types d’engrais répondent à des besoins différents. « Chacun a ses particularités : le lisier offre par exemple des minéraux que l’engrais chimique n’a pas, alors qu’en revanche, l’engrais chimique offre plus de souplesse dans la quantité d’éléments pouvant être appliqués. Je crois que les producteurs-receveurs vont aller vers ce qui est le plus avantageux pour leur type de culture et de sol, mais aussi en fonction de l’offre et la demande dans leur région », anticipe l’agronome.

Un point de vue que partage le transporteur agricole Yvon Guérard, propriétaire de la Ferme Somerset, à Plessisville dans le Centre-du-Québec. Bien qu’il constate que le produit est beaucoup plus convoité qu’avant en raison de la hausse du prix des engrais chimiques, il croit malgré tout que sa valeur repose sur l’offre et la demande, qui varie grandement d’une région à l’autre. « T’as beau faire payer. Si tu es dans une région où il n’y a pas de demande, ça ne marchera pas », insiste-t-il.

Le producteur Clément Nadeau admet que la valeur du lisier est vraiment un problème qui touche surtout la région de Chaudière-Appalaches, où la densité d’élevages porcins est plus grande qu’ailleurs. « On a besoin de notre producteur-receveur [celui qui possède les terres à fertiliser pour épandre notre lisier], donc on est toujours un peu coincés [en leur imposant un prix] et on ne peut pas vraiment transporter le lisier très loin dans des régions où les besoins sont plus grands, car ça va faire augmenter les coûts », affirme-t-il.


Pour lire notre dossier complet intitulé  « Le parfum de l’or brun », consultez La Terre de chez nous du 11 mai 2022.