Acériculture 27 mars 2022

Plus de 100 ans d’expérience dans les sucres

SAINTE-JULIENNE –Normand Urbain, assisté de sa conjointe Annie St-Onge dans la gestion de leur entreprise acéricole de Sainte-Julienne, dans Lanaudière, a pour vision de toujours améliorer la santé et l’équilibre de l’érablière reçue de ses aïeux, pour un jour la transmettre à ses enfants et à ses petits-enfants. 

Fiche technique

Nom de la ferme
Érablière Urbain

Spécialité
Production acéricole

Année de fondation
Il y a plus de 100 ans

Noms des propriétaires
Normand Urbain et Annie St-Onge

Nombre de générations
5

Superficie en culture
56 hectares + 14 hectares en location

L’eau d’érable coule enfin à l’Érablière Urbain de Sainte-Julienne, dans Lanaudière, un peu plus tard qu’ailleurs dans la province. « On commence souvent plus tard au printemps, mais la saison se poursuit, quand ailleurs, c’est déjà fini », dit Normand Urbain.

Après son père Rolland et à la suite de son grand-père et de son arrière-grand-père maternel, Normand Urbain a repris l’érablière familiale, avec sa conjointe Annie St-Onge. Leurs enfants Antoine et Florence représentent fièrement la 5génération.

Normand Urbain admire le réseau de tubulures flambant neuves qu’il inaugure cette année dans son érablière de 56 hectares, gérée en mode biologique depuis 2008, où il compte 8 600 entailles, bientôt 9 000. « Pendant longtemps, j’avais l’impression qu’il fallait respecter ce qui était là, ne rien toucher, par respect pour ce que mes ancêtres avaient fait avant moi. Puis, j’ai réalisé qu’il ne fallait pas s’accrocher au passé. Maintenant, j’améliore les installations à mon goût. C’est ce qu’ils ont fait eux-mêmes. »

C’est quand un incendie a détruit une partie de l’érablière en 2000, que Normand, qui se destinait à autre chose, a pris la décision de prendre la relève. « Mes parents ont toujours été là pour moi, c’était normal que je sois là pour eux. »

L’érablière Urbain de Sainte-Julienne, où l’on produit du sirop d’érable certifié biologique destiné à être vendu en vrac.
L’érablière Urbain de Sainte-Julienne, où l’on produit du sirop d’érable certifié biologique destiné à être vendu en vrac.

Et la relève…

Depuis quelques années, Antoine, 14 ans, apprend le métier d’acériculteur. « J’entaille les érables, j’installe les lignes, je fais les réparations. Au printemps passé, pendant que l’école se faisait à distance à cause de la COVID, j’ai passé un mois ici avec mon père. » Une expérience que tous les deux semblent avoir fort appréciée.

Florence, huit ans, est tout aussi indispensable dans l’équipe. « J’aide à tenir les tubes quand on les installe, laver les équipements, passer le balai! » dit-elle. Mais surtout, mentionne son père en rigolant : « Elle est très bonne pour se faufiler et aller nettoyer des endroits inaccessibles que personne d’autre ne peut atteindre! » C’est aussi elle qui fait jouer et courir le chien Buddy, soutien moral de la famille. Au passage de La Terre, la petite Florence courait avec lui dans les chemins qui traversent l’érablière enneigée. Les feuilles dorées des hêtres resplendissaient sous le soleil du printemps.

Antoine Urbain et son père, Normand Urbain, sont prêts pour la saison des sucres 2022.
Antoine Urbain et son père, Normand Urbain, sont prêts pour la saison des sucres 2022.

« Je fais attention de laisser des essences compagnes quand je débroussaille. Même si la norme est d’entailler les arbres à partir de huit pouces de diamètre, moi j’entaille à dix pouces, car je pense que trop s’approcher du cœur les affaiblit. La santé de ma forêt est primordiale. Je l’emprunte à mes enfants et petits-enfants, c’est comme ça que je vois ça », dit Normand Urbain.

Leur maman, Annie St-Onge, s’implique sur le plan de l’administration, même si elle occupe un emploi à l’extérieur à temps plein. « J’ai aussi appris de Lise, la mère de Normand, décédée en 2019, à fabriquer les sous-produits, beurre, cornets, et autres, que je vends à notre domicile quand c’est la saison. C’est moi qui m’occupe du marketing, des réseaux sociaux et des relations avec la clientèle. » Encore tout récemment, elle occupait un emploi aux Producteurs et productrices acéricoles du Québec (PPAQ).

S’impliquer dans la cause des acériculteurs et la communauté, c’est tout naturel dans la famille. Rolland Urbain, décédé en 2018, est bien connu pour les combats qu’il a menés en tant que président du Syndicat des producteurs acéricoles de Lanaudière, de 1995 à 2016. Normand, tout comme son père, est administrateur au sein du syndicat régional en plus d’être conseiller municipal à Repentigny, lieu de résidence de la famille.

« C’est incroyable le chemin qu’on a parcouru, les acériculteurs. Autrefois, c’était une activité familiale, complémentaire. Maintenant, c’est devenu une industrie qui fait vivre des gens dans des endroits où c’est parfois difficile. Ici, ça fait plus de 100 ans qu’on est là. On a vécu les pluies acides dans les années 1980, le verglas de 1998, et un incendie en 2000, et on a emmené l’érablière au niveau où elle est rendue aujourdhui », rappelle Normand Urbain, tandis que la fierté brille dans les yeux de toute la famille réunie.

Le bon coup de l’entreprise

Déjà impliqué dans l’entreprise depuis 2000, Normand Urbain a participé avec son père à sa conversion en biologique en 2008. « De devoir respecter les normes biologiques, ça m’a rendu curieux. Je me suis mis à faire des recherches pour en apprendre plus et améliorer toujours plus mes pratiques. Je suis devenu plus conscient », dit -il.

Sa prise de conscience avait commencé bien avant. « Déjà enfant, je critiquais mon grand-père quand je le voyais jeter ses déchets dans la forêt. À cette époque, il n’y avait pas de collecte des ordures ici. Mes cours d’écologie m’avaient sensibilisé au respect de la nature. Pour moi, il fallait faire attention à la forêt. »

Aujourd’hui, Normand est fier des pratiques de gestion qu’il applique dans son érablière. « Depuis que les normes biologiques existent, on s’est questionné collectivement sur nos pratiques et c’est le milieu acéricole au complet qui évolue et qui en profite. » 

Florence Urbain et le chien Buddy s’amusent dans les chemins enneigés de l’érablière Urbain.
Florence Urbain et le chien Buddy s’amusent dans les chemins enneigés de l’érablière Urbain.

Fait maison

Un peu partout dans l’Érablière Urbain, des innovations de leur cru facilitent la vie de l’équipe. Du côté de la bouilloire, ils planchent actuellement sur un système qui permettra de la laisser fonctionner en permanence afin d’économiser l’énergie des remises en marche. « Tout le monde s’implique et propose des solutions », dit Normand Urbain.

C’est aussi le cas dans la station de pompage, où le système a été conçu en fonction de leurs besoins. « Mon électricien a eu l’idée d’installer un mécanisme qui permet à la fenêtre de s’ouvrir toute seule quand la température monte trop dans la cabane, ce qui entraînerait l’arrêt du pompage. »

Normand Urbain montre les différents systèmes créés sur mesure dans la station de pompage de l’érablière.
Normand Urbain montre les différents systèmes créés sur mesure dans la station de pompage de l’érablière.