Page conseils 8 février 2022

Mieux protéger nos maternités porcines : la gestion des visiteurs

Le risque d’introduction de maladies exotiques, l’émergence de la diarrhée épidémique porcine et plusieurs maladies qui persistent sur le territoire ­québécois, tel que le syndrome reproducteur et respiratoire porcin (SRRP), mettent la filière porcine sur le qui-vive.

Une biosécurité irréprochable sur les sites porcins est essentielle pour prévenir l’introduction d’agents pathogènes. L’objectif principal de cette biosécurité est de contrer plusieurs voies de transmission, notamment l’introduction d’animaux ou de semence infectés, ou de vecteurs contaminés (ex. : équipements, vêtements, véhicules, aliments). Les efforts doivent également viser les visiteurs, qui peuvent véhiculer involontairement les agents pathogènes entre les sites.

Qui sont les visiteurs?

Le Laboratoire d’épidémiologie et de médecine porcine (LEMP) a enquêté sur la fréquence des visiteurs et la biosécurité au sein de 84 maternités porcines durant le mois précédant l’introduction d’un nouveau virus du SRRP entre 2014 et 2017. Au total, 87 % des maternités ont reçu au moins un visiteur au cours de ce mois. Parmi celles-ci, 29 % ont admis un seul visiteur; 42 % en ont admis de 2 à 4; 22 % de 5 à 9; et 7 % comptabilisaient 10 visiteurs et plus. Les différentes catégories de visiteurs étaient : service technique (63 %), entretien (44 %), exterminateur (42 %), médecin vétérinaire (25 %), ­stagiaire/étudiant (12 %), équipe de lavage (11 %), ­inspecteur/valideur (7 %) ou autres (7 %). Certains visiteurs ne sont passés qu’une seule fois au cours du mois (ex. : vétérinaire), alors que d’autres ont effectué plusieurs visites (ex. : entretien, service technique).

La biosécurité était-elle en place?

Les mesures de biosécurité suivantes ont été observées dans les maternités ayant reçu des visiteurs : portes barrées à clé en tout temps (66 %), registre signé à ­l’entrée par les visiteurs (38 %), douche ou entrée délimitée en trois zones (contaminée, intermédiaire, propre) avec changement de bottes, salopettes et lavage de mains (70 %). Toutefois, la fréquence de ces pratiques de biosécurité pourrait être sous-estimée, puisque l’étude se limitait aux maternités avec introduction récente du virus du SRRP.

Des rehaussements sont néanmoins souhaitables étant donné la fréquence et la variété des visiteurs. Une porte d’entrée verrouillée limite l’accès des visiteurs non autorisés, et permet de s’assurer de l’observance du protocole d’entrée pour les visiteurs autorisés. En colligeant dans un registre le nom de chaque personne ayant accès aux bâtiments, la date, la raison de la visite et le nom du dernier site porcin visité, nous disposons des informations critiques et primordiales pour le ­traçage lors d’éclosions. Finalement, une entrée délimitée en trois zones, où une douche peut agir à titre de zone intermédiaire, est essentielle pour limiter le risque que les bottes, vêtements ou mains servent de vecteurs.

Il faut demeurer vigilant

La biosécurité doit être une préoccupation quotidienne et doit être maintenue et rehaussée au besoin pour faire face aux menaces grandissantes. La peste porcine africaine s’est récemment introduite dans les Caraïbes et une augmentation des introductions du virus du SRRP dans les maternités a été observée en 2020-2021; c’est le pire bilan jamais enregistré par le LEMP depuis 2014-2015. Nous ne pouvons prendre aucun risque et nous devons nous assurer que des mesures appropriées et rigoureuses sont en place.

CHANEL BÉLISLE, Dre JULIE ARSENAULT, m.v., SYLVIE D’ALLAIRE et Dre MARIE-ÈVE LAMBERT, m.v. 
Laboratoire d’épidémiologie et de médecine porcine (LEMP)
Centre de recherche en infectiologie porcine et avicole (CRIPA-FRQNT)
Faculté de médecine vétérinaire, Université de Montréal