Actualités 26 novembre 2021

Quand les porcelets se font dorer la couenne

Alors que les chercheurs comprennent mieux le rôle de la vitamine D sur la santé des porcelets, une étudiante de l’Université Laval s’est penchée sur la meilleure stratégie possible pour améliorer le statut postnatal de ce micronutriment. La recette gagnante? Un cocktail de supplémentation et de courtes sessions de bronzage!

Jumelé à une supplémentation directe, le rayonnement UBV a permis d’augmenter de façon significative le statut en vitamine D chez les porcelets avant le sevrage. Photo : Gracieuseté
Jumelé à une supplémentation directe, le rayonnement UVB a permis d’augmenter de façon significative le statut en vitamine D chez les porcelets avant le sevrage. Photo : Gracieuseté

Si la vitamine D est connue pour son rôle dans le métabolisme du calcium et du phosphore et dans le développement musculaire, la science a découvert plus récemment qu’elle pouvait améliorer le microbiote intestinal et le système immunitaire. Or, des travaux récents menés par Jacques Matte d’Agriculture et Agroalimentaire Canada ont démontré que le transfert de certains micronutriments, en particulier la vitamine D, était très limité durant la gestation des porcelets. Le statut de cette vitamine demeure hélas très faible même après la lactation via le colostrum et le lait de la truie.

« On peut supposer que le statut en vitamine D est très bas parce que les animaux sont cloisonnés en ferme depuis les années 1960. Oui, il y a amélioration des performances et du statut sanitaire, mais cela entraîne potentiellement des carences en micronutriments naturellement présents à l’extérieur, comme c’est le cas avec la vitamine D qui peut être synthétisée par la simple exposition au soleil », résume Lucie Galiot, étudiante au postdoctorat en sciences animales à l’Université Laval.

Supplémenter, mais comment?

Considérant que le sevrage met à mal le microbiote intestinal et le système immunitaire du porcelet, l’éleveur aurait intérêt à prévenir les carences en vitamine D. C’est pourquoi Mme Galiot a envisagé la supplémentation et le développement de stratégies pour améliorer le statut de ce micronutriment, dans le cadre de sa thèse de doctorat sous la supervision de Jacques Matte et de Frédéric Guay.

Afin d’identifier une technique optimale, Lucie Galiot a testé la supplémentation en vitamine D de façon indirecte via des truies quelques jours avant la mise bas et pendant la lactation. Elle a aussi supplémenté de façon directe des porcelets avec cinq traitements différents, dont un rayonnement UVB dans une « chambre solaire » s’apparentant à une cabine de bronzage. Les sujets y étaient amenés à raison de 30 minutes aux deux jours. En ce qui a trait aux quantités de suppléments, Mme Galiot a décidé de doubler les recommandations quotidiennes pour en voir les effets. La supplémentation était donnée au jour 2 et au jour 8, à l’exception du rayonnement UVB, qui débutait au jour 3.

En analysant le lait au jour 14, Mme Galiot a observé une augmentation du ­statut en vitamine D du simple au double (0,2 ng/mL) grâce à la supplémentation de la truie, ce qui permet d’envisager un possible transfert plus efficace de cette vitamine via le lait. « Cependant, l’effet de la supplémentation de la truie pour tous les traitements sur le statut du porcelet n’est pas énorme », nuance celle qui donnait une conférence sur le sujet au Colloque scientifique en production porcine et avicole, organisé par le CRAAQ en octobre dernier.

La supplémentation directe des porcelets a permis quant à elle une augmentation rapide du statut en vitamine D pour atteindre jusqu’à 20 ng/mL au jour 8 et décliner par la suite. En revanche, le rayonnement UVB, même épisodique, a entraîné une progression de façon constante vers le même ratio, et ce, à l’approche du sevrage.

« On peut conserver la supplémentation à la truie [25-OH-D3; 4 kIU], parce qu’on voit que ça a quand même un effet bénéfique dans le transfert au porcelet et dans la concentration dans le lait. Pour le ­porcelet, on choisit le 25-OH-D3, qui est la meilleure supplémentation à court terme, et l’exposition aux rayons UVB pour ses effets bénéfiques à long terme », suggère Mme Galiot.

La supplémentation directe en vitamine D et le rayonnement UBV permettraient de mieux préparer les porcelets au stress lié au sevrage. Photo : Archives/TCN
La supplémentation directe en vitamine D et le rayonnement UVB permettraient de mieux préparer les porcelets au stress lié au sevrage. Photo : Archives/TCN

Des lampes de vivarium

Dans un second temps, Lucie Galiot a voulu mesurer l’effet de cette stratégie dans un contexte commercial et la comparer aux résultats en laboratoire. Pour reproduire l’effet de sa « cabine de bronzage » chez un éleveur, elle a remplacé la lampe à infrarouge derrière la truie par une lampe fluorescente qui sert habituellement à éclairer les vivariums où l’on garde les lézards. Vu que les porcelets ont libre accès à la cage de mise bas, la durée d’exposition a été réglée à deux heures par jour pour qu’elle soit suffisante. De plus, la lampe a été ­placée hors d’atteinte des porcelets, afin d’éviter tout bris.

Si la supplémentation aux truies a eu un effet positif, mais limité, en contexte commercial, c’est surtout la supplémentation directe aux porcelets qui a retenu l’attention de Lucie Galiot, avec un bond de 50 % du statut en vitamine D au moment du sevrage à la ferme et de 300 % en station expérimentale. « On peut expliquer cette différence par le contexte plus ­challengeant d’un élevage commercial, mais aussi dans la façon de donner les rayons UVB », ­commente Lucie Galiot.

Cette dernière croit qu’il serait pertinent de trouver une meilleure façon d’installer les lampes UVB dans une ferme pour se rapprocher des résultats en station expérimentale et d’établir une charte pour connaître les besoins précis des porcelets pour ce micronutriment. Bien que les effets s’estompent vers le jour 42, la supplémentation directe en vitamine D et le rayonnement UVB permettent de mieux préparer les porcelets au stress lié au sevrage, conclut l’étudiante au postdoctorat. Cela étant dit, la prudence avec l’usage des lampes UVB est de mise pour éviter que les porcelets soient surexposés à cette lumière et développent… des coups de soleil!