Actualités 10 août 2021

Des indicateurs de santé des sols pour les maraîchers bio

La présence et l’abondance de la vie microbienne dans un sol, et plus précisément de microorganismes clés bénéfiques aux plantes, sont de précieux alliés pour les producteurs maraîchers en mode de production biologique.

En effet, un sol vivant améliore la résilience des cultures face aux stress biotiques et abiotiques. La présence de microorganismes bénéfiques amène donc une valeur agronomique ajoutée au sol. Les services offerts par les laboratoires d’analyses de sols agricoles du Québec incluent peu ou pas d’analyses adaptées aux entreprises en production végétale biologique, notamment pour l’évaluation de la vie microbiologique des sols. La raison en est bien simple : peu d’analyses sont actuellement disponibles et calibrées pour évaluer la vie microbiologique de manière rigoureuse, tout en étant simples et abordables. Biopterre, Centre de développement des bioproduits, en collaboration avec le Centre d’expertise et de transfert en agriculture biologique et de proximité (CETAB+) et le laboratoire d’analyses de sols AgroEnviroLab, a réalisé un projet de recherche visant à développer des indicateurs microbiologiques de la santé des sols destinés dans un premier temps aux producteurs maraîchers biologiques.

Dans le cadre de ce projet, 12 fermes maraîchères biologiques en champ ont été sélectionnées dans différentes régions du Québec selon le potentiel théorique de rendement du sol d’une de leurs parcelles en culture. Les sols choisis ont fait l’objet d’une description agropédologique détaillée et d’échantillonnage du sol de surface en été et en automne. Par la suite, quatre méthodes d’analyse visant le dénombrement de cellules microbiennes et de nématodes dans le sol, la quantification de l’activité enzymatique microbienne du sol ainsi que l’évaluation du potentiel de mycorhization du sol ont été adaptées de la littérature scientifique, testées sur les échantillons de sols et évaluées pour leur pertinence à être utilisées en tant qu’indicateurs microbiologiques de la santé des sols. Ces méthodes ont été sélectionnées parce qu’elles apparaissaient comme techniquement accessibles à faible coût et donnant des résultats possiblement pertinents pour les producteurs maraîchers en mode biologique.

Un projet novateur

L’aspect novateur du projet consiste principalement en l’adaptation de protocoles de laboratoire en méthodes d’analyses usuelles pour l’évaluation rapide de la vie microbiologique dans des échantillons de sol. Parallèlement au développement des indicateurs microbiologiques, les échantillons de sol ont également été analysés en utilisant les indicateurs de santé des sols déjà offerts par le laboratoire d’analyse de sol AgroEnviroLab afin de mieux comprendre comment les interpréter en agriculture biologique.

Par des analyses statistiques, les résultats obtenus à l’aide de l’ensemble des indicateurs de santé des sols ont ensuite été corrélés entre eux, mais également au potentiel de rendement des cultures maraîchères par site et aux pratiques culturales afin d’en dégager des tendances. Les résultats de trois protocoles ont montré des corrélations fortes avec ceux des indicateurs de santé des sols : dénombrement cellulaire microbien, décompte des nématodes et évaluation du potentiel de mycorhization du sol, démontrant la robustesse des méthodes. Enfin, certaines interprétations agronomiques ont été effectuées afin de traduire les résultats des analyses en évaluations accessibles pour les producteurs maraîchers biologiques.

Ce projet fait partie des premières démarches mises en place au Québec pour corréler statistiquement du point de vue agronomique différents indicateurs de santé des sols, incluant des indicateurs microbiologiques, à des potentiels de rendement de cultures en maraîchage biologique; un premier pas pour lier l’activité microbiologique des sols à des pratiques culturales et à des potentiels de rendement. Dans les années à venir, des prélèvements de sols devraient être réalisés et analysés pour enrichir une base de données afin d’obtenir de meilleures interprétations des indicateurs microbiologiques, ce qui permettra de formuler des recommandations agronomiques spécifiques pour les producteurs maraîchers biologiques en champ.

Nicolas Gamache, ingénieur, professeur en agroenvironnement à l’Institut de technologie agroalimentaire du Québec, campus de La Pocatière, et professeur associé à Biopterre