Actualités 25 juin 2021

Le fourrage cultivé en région nordique plus nutritif

Malgré un rendement moindre, le fourrage cultivé en région nordique aurait une valeur nutritive plus élevée, selon une étude menée au Québec.

« On entendait souvent des agriculteurs qui véhiculaient l’idée que les plantes fourragères produites en région nordique avaient une plus grande valeur nutritive. On a voulu vérifier », explique Gaëtan Tremblay, chercheur scientifique à Agriculture et Agroalimentaire Canada. Avec sa collègue Rachel Gervais, de l’Université Laval, Gaëtan Tremblay a lancé un projet de recherche qui s’est étalé sur cinq ans et dont les résultats ont été publiés en 2019.

L’objectif était de comparer la valeur nutritive de plantes fourragères destinées aux vaches et cultivées en région nordique, c’est-à-dire dans ce cas-ci au nord du 48e parallèle, avec la valeur nutritive de plantes cultivées plus au sud du Québec. Pour ce faire, le groupe de chercheurs avait choisi trois sites de récolte dont les sols ont été analysés et amendés, de façon à offrir aux plantes des conditions similaires.

Le site le plus au nord était à Normandin, au Saguenay–Lac-Saint-Jean. Les deux autres champs étaient situés plus au sud, soit à Saint-Augustin-de-Desmaures, près de Québec, et à Sainte-Anne-de-Bellevue, dans l’ouest de l’île de Montréal. Après avoir ensemencé les trois prairies de luzerne et de fléole des prés en 2014, les chercheurs y ont récolté le fourrage, en 2015 et 2016, à trois reprises durant la saison. Les échantillons prélevés ont ensuite fait l’objet d’analyses en laboratoire. « Selon nos résultats, pour un stade de récolte donné, la qualité nutritive et la teneur en fibres du fourrage nordique étaient plus élevées. Grâce à des tests in vitro, on a aussi constaté qu’il offrait une meilleure digestibilité », indique Gaëtan Tremblay.

La culture en région nordique n’a cependant pas que des avantages, nuance le chercheur. « Ce qu’on a constaté, c’est que cette valeur nutritive plus élevée est aussi associée à un rendement plus faible. » Le rendement en tonnes de matière sèche récoltées à l’hectare serait en effet 39 % moins élevé pour la luzerne et 35 % moins élevé pour la fléole des prés à Normandin qu’à Saint-Augustin-de-Desmaures, selon les données obtenues.

« Après 200 degrés-jours, soit le stade de récolte recommandé, la plante n’avait pas atteint le même stade physiologique d’une région à l’autre. En région nordique, les plantes n’ont pas eu l’occasion de faire autant de photosynthèse; elles étaient moins grandes, moins lignifiées », explique Rachel Gervais.

Les dates de récolte recommandées étant les mêmes pour l’ensemble du Québec, faudrait-il récolter à un autre moment en région nordique? Les chercheurs se posent la question. Leurs observations les portent à penser qu’il faudrait pousser la recherche plus loin pour le déterminer, explique Rachel Gervais.

« Ce qu’on réalise, dit-elle, c’est que les courbes qu’on utilise conviennent moins en région nordique. En tant que société, investir pour étudier davantage la relation entre le ­développement de la plante et le nombre de degrés-jours pourrait nous permettre d’établir de ­meilleures recommandations, plus adaptées aux différentes régions, et ainsi être plus efficaces et faire de meilleures projections. »