Actualités 27 avril 2021

L’homme qui doit planter des arbres…

Dans son plus récent plan de réduction des émissions de gaz à effet de serre, le gouvernement fédéral planifie la plantation de 2 milliards d’arbres en 10 ans (Ressources naturelles Canada, 2020). Cette initiative tire son origine de la capacité des arbres à fixer, par la photosynthèse, le gaz carbonique (CO2) atmosphérique pour l’incorporer à leur métabolisme. Les arbres, ces végétaux pouvant vivre des décennies, voire des siècles, séquestrent donc le carbone pendant un ­certain temps.

Cela dit, les arbres apportent d’autres bienfaits directs sur nos sociétés. Dans les grandes régions urbaines du monde, les arbres constituent le meilleur outil pour réduire les effets néfastes des chaleurs extrêmes et des îlots de chaleur. Avec les mesures actuelles, il est peu probable que la cible de limiter le réchauffement à +1,5 °C soit atteinte. Les épisodes de chaleur extrême seront plus fréquents et plus intenses. Une forêt urbaine peuplée d’arbres matures produit une canopée qui joue le rôle de parasol et diminue significativement la température au sol. Cependant, les arbres doivent être d’une certaine envergure et cela prend des années pour y arriver.

Malheureusement, le choix des espèces arboricoles en milieu urbain fait au cours des dernières décennies a participé à la diminution importante de la biodiversité. Tout comme une monoculture, la forêt urbaine se limitait en grande partie au frêne, au tilleul, à l’érable de Norvège et à l’érable argenté. Nous connaissons la suite en ce qui concerne les ravages faits par l’agrile du frêne, mais une espèce comme l’érable de Norvège apporte aussi son lot de problèmes (espèce envahissante des milieux naturels et anthropiques, exigence d’entretien, etc.). Dans un souci de créer une forêt urbaine apte à combattre le réchauffement climatique et à résister au stress urbain, la nouvelle orientation des villes par rapport à la gestion de la forêt urbaine est maintenant axée sur la biodiversité des espèces arboricoles pour qu’elle soit résiliente face aux enjeux de demain.

En milieu périurbain, les arbres apportent aussi des bienfaits. Ils sont utilisés comme haies brise-vent et barrières sonores végétales entre les champs et les quartiers résidentiels et ils embellissent les parcs où jouent les enfants.

Bien qu’ils peuplent déjà le paysage rural, les arbres pourraient jouer un rôle encore plus important dans le système agroforestier québécois. L’agroforesterie ­suscite de plus en plus d’intérêt, mais il convient de détailler ici les différentes utilisations des arbres en milieu agricole.

Des bienfaits en milieu agricole

Dans les aménagements agricoles visant la stabilisation des pentes et les bandes riveraines, les arbres, accompagnés d’arbustes et de plantes herbacées, procurent une vingtaine de bienfaits sur la santé des sols, la qualité de l’eau et la biodiversité. Ces aménagements arboricoles permettent notamment de diminuer l’érosion des rives et de réduire la sédimentation de particules lessivées dans les cours d’eau (Fédération interdisciplinaire de l’horticulture ornementale du Québec, 2013).

Les haies brise-vent peuvent aussi contribuer à ces bienfaits en plus de participer à la lutte contre les changements climatiques. Lorsque ces projets sont bien élaborés, ils permettent d’accroître le rendement des cultures; des haies trop rapprochées ou trop éloignées n’apporteront donc pas les effets escomptés. La composition végétale et le nombre de rangées font partie des points à considérer lors de l’analyse du site. L’ajout de cultures associées (ex. aronia) est une option permettant de diversifier ses revenus. Les haies brise-vent peuvent aussi protéger les bâtiments des grands vents et, ainsi, diminuer substantiellement les coûts de chauffage.

Initialement abordée sous l’angle de la lutte contre les changements climatiques, l’implantation d’arbres en milieux urbains et ruraux revêt une importance capitale puisqu’elle apporte de nombreux bienfaits. C’est un fait : l’homme doit planter des arbres pour améliorer son environnement…

Patrick Fafard, professeur en Paysage et commercialisation en horticulture ornementale à l’Institut de technologie agroalimentaire, campus de Saint-Hyacinthe