Page conseils 9 novembre 2020

Les nématodes en production maraîchère : plus répandus que l’on pense?

Les nématodes sont les organismes multicellulaires les plus nombreux de la planète; en nombre, ils constituent les 4/5 du règne animal! Ils sont présents dans la plupart des milieux, y compris l’eau, le sol, les tissus animaux et végétaux. Sous le sol, parmi les nombreuses espèces présentes, se trouvent des nématodes parasites des plantes, néfastes pour certaines cultures.

Plusieurs penseront d’emblée aux nématodes dorés, mais saviez-vous que la pomme de terre est loin d’être la seule culture touchée par ces vers microscopiques? Les carottes, les fraises, les oignons, l’ail, les tomates et les piments sont également des cultures dans lesquelles les nématodes peuvent causer des dommages non négligeables.

Parmi les nématodes qui sont les plus problématiques en production maraîchère, on trouve les nématodes cécidogènes (Meloidogyne sp.) et les nématodes lésions des racines (Pratylenchus sp.). Comment savoir qu’il y a des nématodes dans des champs, si nous ne pouvons les voir? La première étape est de reconnaître les symptômes : souvent localisés, ils peuvent varier selon la culture. Chez la carotte par exemple, on remarque des déformations importantes de la racine principale, ainsi que des radicelles plus nombreuses et la présence de petits kystes blanchâtres. Dans les fraises, les piments ou les tomates, il faut plutôt chercher, au-dessus du sol, des zones où les plants sont rabougris, ont une croissance végétative lente et des carences multiples.

Puisque les nématodes causent des microblessures aux racines, ils sont également néfastes d’une manière détournée, en facilitant l’entrée de bactéries et de champignons pathogènes. Si vous remarquez des infections plus importantes, et plus hâtives, de maladies comme la verticilliose ou l’anthracnose dans certains champs ou certaines sections de champs, ça pourrait également être un signe de la présence de nématodes. Généralement, on les retrouve en plus grand nombre dans les sols sableux, où ils se déplacent plus facilement, et la présence de mauvaises herbes leur est également favorable. Par exemple, le nématode des lésions se reproduit ­abondamment sur la matricaire odorante, la vesce jargeau et le chiendent.

Rotation et cultures trappes

Lorsqu’un problème de nématodes est suspecté, l’échantillonnage et l’analyse du sol des endroits atteints permettront de confirmer les espèces présentes et les niveaux des populations. La lutte peut ensuite débuter! Si la survie du nématode en l’absence de plante hôte est courte, comme c’est le cas du cédidogène, la rotation avec une culture résistante (céréale) permet de réduire la population du ravageur de façon importante. Les cultures trappes – c’est-à-dire qui ont une croissance et une récolte rapides, comme les radis ou les épinards – sont également efficaces pour lutter contre ce type de nématodes, puisque ceux-ci n’ont pas le temps d’y compléter leur cycle de reproduction.

Le millet perlé fourrager s’avère pour sa part un moyen de lutte intéressant contre les nématodes des lésions, qui comptent de trop nombreuses plantes hôtes pour que la rotation des cultures soit à elle seule une option efficace. De nouvelles variétés de radis fourrager, sélectionnées pour leur haute teneur en glucosinolates, qui agissent comme un fumigant naturel, sont également offertes. Utilisées comme engrais vert, elles peuvent aider à diminuer les populations.

Finalement, il est encourageant de savoir qu’en ce qui concerne la lutte chimique, de grands efforts sont déployés afin de mettre en marché une nouvelle génération de nématicides, plus spécifique aux ravageurs et moins dommageable pour les autres ­microorganismes utiles du sol. 

Le saviez-vous?

Plusieurs espèces de nématodes s’avèrent utiles à l’agriculture. Certains sont même commercialisés comme biopesticides, parce qu’ils parasitent des insectes nuisibles ou se nourrissent d’agents pathogènes. Ils participent aussi à la minéralisation des éléments nutritifs du sol et les rendent disponibles aux cultures. 

Éliane Lauzon-Laurin, technologue agricole professionnelle, Agrocentre Lanaudière
Catherine Faucher, agr., Réseau Agrocentre