Maraîchers 24 novembre 2022

Virus de la mosaïque du concombre : encore pire qu’en 2007

SAINT-RÉMI-DE-NAPIERVILLE – Après 15 ans d’une relative accalmie, les producteurs maraîchers du Québec subissent de nouveau les ravages du virus de la mosaïque du concombre. Les fortes pluies enregistrées sur le sud de la province en juin auraient favorisé la prolifération du puceron du soya, porteur de la maladie. Une cinquantaine de producteurs seraient touchés, surtout dans les régions de Laval, Lanaudière et en Montérégie, selon l’Association des producteurs maraîchers du Québec (APMQ).

Malgré son nom, le virus de la mosaïque  du concombre s’en prend à d’autres végétaux. C’est le cas du poivron, de la courge,  de l’aubergine, du melon et de la tomate,  par exemple. Photo : Gilbert Pigeon Giguère
Malgré son nom, le virus de la mosaïque du concombre s’en prend à d’autres végétaux. C’est le cas du poivron, de la courge, de l’aubergine, du melon et de la tomate, par exemple. Photo : Gilbert Pigeon Giguère

Les champs de haricots de la Ferme Roland Pigeon et fils seront beaucoup moins généreux que d’habitude cette année. Selon Gilbert Junior Pigeon, propriétaire de la ferme avec sa tante, sa cousine et sa sœur, il s’agit d’une saison à oublier. « Ça a été des pertes immenses pour nous cette année, en plus de dépenses additionnelles pour essayer d’avoir le dessus sur ce parasite », soutient le producteur maraîcher. « Sur l’ensemble de l’année, on s’attend à tout près de 50 % moins de rendement en termes d’unités vendues », dit-il. Tout ça, à cause d’un minuscule puceron et du virus qu’il transporte.

« Le puceron du soya voyage avec les courants d’air chaud à partir des États-Unis », explique Catherine Lessard, directrice économie, politique et recherche à l’Association des producteurs maraîchers du Québec. « Le puceron se nourrit dans les champs de soya et lorsqu’ils deviennent très nombreux, ils s’envolent pour explorer d’autres cultures, dont les cultures maraîchères », poursuit-elle.

C’est à partir de ce moment que les choses se gâtent pour les producteurs maraîchers. « Le puceron fait ce qu’on appelle des piqûres exploratoires d’un légume à l’autre pour voir s’il aime le légume sur lequel il est. 

C’est par ces piqûres qu’il transmet le virus », précise ­l’agroéconomiste qui insiste pour rappeler que la maladie ne présente aucun danger pour la santé humaine. 

Pas juste les concombres

Malgré son nom, le virus de la mosaïque du concombre s’en prend à d’autres végétaux. C’est le cas du poivron, de la courge, de l’aubergine, du melon et de la tomate, par exemple. Sa présence laisse une petite marque sur le légume ou le feuillage de la plante. Elle peut prendre la forme d’une tache noire ou d’un petit point noir, par exemple. Plus le puceron arrive tôt dans le processus de croissance de la plante, plus les dégâts causés par le virus risquent d’être importants. « De façon générale, les pertes varient entre 100 % et 10 à 20 % », soutient Catherine Lessard. « Des producteurs ont complètement perdu leur récolte à cause du virus », soutient-elle. 

À la Ferme Roland Pigeon et Fils, la présence du virus s’est traduite par des plants moins généreux et des haricots parfois difformes. « On pouvait avoir un plant avec 20-25 fèves par plant puis, juste à côté, un autre avec 3, 4 ou aucune fève », raconte Gilbert Junior Pigeon. « Dans certains plants, on se retrouvait avec de grandes fèves, d’autres avec de petites, des fèves croches, d’autres droites… Or, une fève croche ne passe pas le test de qualité des grandes surfaces », ajoute le ­producteur. 

Il faut revoir les politiques

L’épisode du virus de la mosaïque du concombre doit réveiller les autorités, estime Patrice Léger Bourgoin, directeur général de l’Association des producteurs maraîchers du Québec. « Avant, on pouvait assez bien anticiper des phénomènes cycliques comme celui-ci, mais maintenant, avec les changements climatiques qui semblent arriver plus vite qu’on le croyait, ça devient de plus en plus difficile d’anticiper », ­soutient le gestionnaire. 

Pour Patrice Léger Bourgoin, les autorités doivent accorder plus d’attention et d’importance aux perturbations du climat. « Les programmes actuels de soutien des producteurs ne sont pas adaptés à la nouvelle réalité », dit-il. Bien que des réflexions aient été amorcées ces dernières années, « elles n’ont encore abouti à rien », souligne le directeur général de l’APMQ. « Il faut même remettre en question certaines des pistes d’aide aux producteurs envisagées ces dernières années parce qu’elles ne correspondent plus à la réalité qu’on observe aujourd’hui sur le terrain. »


Un guide a été élaboré par le Réseau d’avertissements phytosanitaires du MAPAQ pour mieux lutter contre le puceron. 
Vous pouvez y accéder en suivant ce lien : agrireseau.net/documents/Document_90333.pdf


Claude Fortin, collaboration spéciale


Cet article a été publié dans notre cahier spécial Fruits et légumes du Québec, paru dans La Terre de chez nous du 9 novembre 2022.