Grandes cultures 20 février 2023

Nouvelles variétés de céréales à paille et de canola, nouveaux défis

La palette des céréales à paille et de canola s’agrandit, pour vous aider à répartir vos risques et même à réduire vos coûts. L’escouade du cahier Grains a deviné pour vous ce qu’en pensent Marie et Jocelyne, les conjointes de Léonard et Sylvain de la localité fictive de Sainte-Anne-des-Semailles.

« Enfin, on trouve le temps de se parler! lance Jocelyne. La situation n’est pas facile cette année en agriculture, n’est-ce pas? Mais on va encore s’en sortir!

– Ouais. Mais pour ça, suivons les recommandations des spécialistes et gardons notre coffre à cultivars bien garni, répond Marie. On conserve ceux qui ont fait leurs preuves, on sème des maturités différentes et on essaie les nouveaux venus à différents endroits.

Et on ne lésine pas sur les rotations, ajoute Jocelyne. Les céréales à paille et le canola, c’est excellent pour le sol en alternance avec le maïs et le soya, tout comme les plantes fourragères. Idéalement, on sème aussi une céréale d’automne et des cultures de couverture : il existe maintenant des guides du CRAAQ pour ça. 

On doit aussi alterner les degrés de résistance aux insectes ou aux maladies : par exemple, pas tous les ans dans le même champ un canola résistant à la hernie. 

As-tu entendu parler de ces producteurs du Lac-Saint-Jean qui sèment des pois avec leur canola? Ça fait une deuxième culture tout en combattant les mauvaises herbes. 

Bonne idée! Ça nous fait toute une diversité de techniques : on aurait avantage à profiter de l’aide de notre famille, des conseillères et conseillers agricoles!

C’est certain. On peut aussi consulter les différents dossiers sur les nouvelles semences. Et il y a le Guide interactif du Réseau Grandes Cultures du Québec*. D’un simple clic, on compare les variétés selon leur rendement, la région, le semencier, la résistance à la verse ou aux maladies… »

Un groupe d’outardes traverse le ciel et suspend la conversation enthousiaste des deux femmes accoudées à la clôture de cèdre.

C’est terrible, ce qui se passe en Ukraine, reprend Marie. Et dire que d’une certaine manière, on est assez proches des agriculteurs de Russie et d’Ukraine. 

Comment ça? demande Jocelyne.

Par exemple, il y a en Ukraine et dans le sud de la Russie les fameux tchernozioms, des sols noirs très riches contenant jusqu’à 15 % de matière organique, même en profondeur. Eh bien, on en trouve aussi au Manitoba!

Intéressant! Savais-tu aussi qu’un simple grain provenant d’Ukraine serait à l’origine de notre blé Marquis, qui a révolutionné l’agriculture canadienne et même nord-américaine dans la première moitié du 20e siècle? Ce blé est né d’un croisement entre une mystérieuse variété qu’on a baptisée chez nous le Red Fife, et un blé venu de l’Inde, le Hard Red Calcutta. En 1842, l’agriculteur ontarien David Fife a reçu une petite quantité de blé d’un ami vivant à Glasgow, en Écosse. Ce dernier avait obtenu le précieux grain d’un bateau arrivant de Pologne.

Le seul grain ayant survécu aux essais de M. Fife aurait donné trois épis, dont les grains se sont multipliés : ce blé, identifié par des spécialistes comme étant le Kalychanka d’Ukraine, produit en abondance un grain d’excellente qualité boulangère. Son succès a été fulgurant. Mais pas autant que celui de son descendant le blé Marquis, au tournant du 20e siècle. Avec le mélange des gènes, ce nouveau-né bénéficiait des mêmes qualités boulangères, mais, plus court, il résistait mieux à la verse et, plus précoce, il évitait la rouille. On retrouverait des gènes du blé Marquis dans la majorité de nos cultivars modernes. 

Incroyable… Mais concernant la guerre, que peut-on faire? 

Nous, producteurs et productrices? Peut-être rester performants. Une partie de nos récoltes dépannera peut-être les pays appauvris. Mais dans le fond, nous, on l’a compris : il faut qu’on sème. »

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Pour accéder au Guide interactif du Réseau Grandes Cultures du Québec : https://www.guidergcq.ca/rgcq/. 


Cet article a été publié dans le cahier Grains de janvier 2023.