Bovins 22 novembre 2022

Bovins laitiers : Pour un usage logique des antibiotiques

Pour le vétérinaire Frédéric Tremblay, un usage judicieux des antibiotiques destinés aux bovins laitiers passe par l’administration « du bon antibiotique à la bonne bactérie et au bon dosage, pendant la bonne période ».

« Avec le temps, on a créé une habitude, et l’habitude, on finit par croire que c’est un besoin. » – Frédéric Tremblay, vétérinaire
« Avec le temps, on a créé une habitude, et l’habitude, on finit par croire que c’est un besoin. » – Frédéric Tremblay, vétérinaire

C’était le thème d’une conférence qu’il a présentée le 2 novembre, à l’occasion du Symposium sur les bovins laitiers, un événement déployé par le Centre de référence en agriculture et agroalimentaire du Québec. M. Tremblay ne cherche pas nécessairement à inciter les producteurs à réduire leur utilisation d’antibiotiques. Celui qui travaille pour le compte du Bureau vétérinaire Sainte-Marie, en Beauce, souhaite plutôt les amener à se questionner sur la nécessité de chaque administration. 

« Avec le temps, on a créé une habitude, et l’habitude, on finit par croire que c’est un besoin », précise le conférencier, dans un entretien accordé en marge de l’événement.

Nouvelles restrictions en 2019

Durant sa conférence, le vétérinaire a rappelé à titre anecdotique l’entrée en vigueur de nouvelles restrictions d’usage pour certains antibiotiques, en février 2019, qui avait suscité beaucoup d’inquiétudes du côté des éleveurs. « Chez nous, en Beauce, une petite panique s’est installée, parce qu’on [appréhendait les restrictions] d’usage sur le Spectramast [pour traiter les mammites] qui faisait partie pas mal de notre protocole de traitement. Les gens se disaient : sans ça, les animaux vont mourir », se souvient-il. 

Après l’arrivée du règlement, les ventes d’antibiotiques qui se donnent en injection ont finalement diminué de 18 % à sa ­clinique, tandis que celles d’antibiotiques administrés par voie intramammaire ont chuté de 36 %. La quantité de vaches traitées par son équipe, en revanche, n’a pas diminué, même qu’elle a légèrement augmenté. « Il n’y a pas eu d’hécatombe bovine après février 2019; ce n’est pas arrivé », souligne le vétérinaire, assurant que les nouvelles restrictions auront finalement généré plus de peur que de mal.   

Un outil de benchmark pour stimuler la réflexion

Le Bureau vétérinaire Sainte-Marie, dans la foulée du nouveau règlement, a mis au point un outil de benchmark servant de point de comparaison d’un client à l’autre, notamment en ce qui a trait à l’usage d’antibiotiques. Avec cette échelle de mesure, les producteurs pouvaient voir clairement où ils se situaient par rapport à leurs confrères quant à la quantité de médicaments qu’ils administraient à leurs bovins. Certains ont sursauté en réalisant qu’ils figuraient parmi ceux qui en utilisaient le plus. Cette prise de conscience à elle seule, illustre le conférencier, en aurait incité plus d’un à changer leurs habitudes. C’est le cas d’un de ses clients qui a réduit radicalement en deux ans la quantité d’antibiotiques qu’il administrait à ses vaches par voie intramammaire à chaque vêlage. Ses animaux, en contrepartie, sont aussi en santé qu’avant. « Il a juste changé son approche. Il est passé d’un mode inquiet à un mode confiant. Et imaginez l’argent que ça fait dans ses poches », évoque M. Tremblay, selon qui plusieurs décisions de traitement se fondent sur l’émotion plutôt que la logique.


Cet article a été publié dans notre cahier spécial La prévention au coeur de la santé animale paru le 16 novembre 2022.