Actualités 2 février 2021

L’art de déjouer les saisons à l’aide des abris de culture

On le sait, la saison de culture est courte au Québec. Afin de déjouer le climat, il est de plus en plus commun d’utiliser des abris de culture, l’objectif étant de récolter plus tôt au printemps et plus tard à l’automne. Serres froides, grands tunnels, minitunnels, tunnels chenilles et couvertures flottantes sont des exemples de structures permettant d’allonger la saison.

Minitunnel du CETAB+
Minitunnel du CETAB+

L’utilisation d’abris de culture permet d’augmenter le rendement vendable grâce à une diminution de la pression causée par des maladies combinée à un meilleur contrôle des températures, de l’irrigation et de la fertilisation. En serre, les rendements peuvent être multipliés par dix en comparaison à la production en champ. Il est donc possible pour les productrices et les producteurs d’amortir une telle structure sur une période de deux à cinq ans.

À l’aide d’une serre froide (structure non chauffée) ou d’une serre minimalement chauffée, il est désormais possible de récolter et de mettre en marché des légumes frais 12 mois par année, plutôt que d’attendre les récoltes aux champs qui débutent en juin. Les carottes, les oignons verts, l’épinard, le chou kale et de nombreuses verdures tolèrent bien les basses températures et les faibles luminosités. L’idée est de les semer à l’automne afin que l’enracinement et la croissance débutent. S’ensuit une période de dormance par grand froid, puis une reprise de l’activité métabolique vers la fin de l’hiver. Lorsque les journées s’allongent et que le soleil est abondant, il peut y avoir un écart de 20 à 30 °C entre la serre et les températures extérieures. La nuit, des bâches flottantes (couvertures thermiques) viennent recouvrir les cultures afin de conserver une chaleur proche du point de congélation.

Une serre dans une serre

Avec une dose de créativité, il est possible d’agencer différentes techniques pour abriter les cultures dans le but d’optimiser la production. C’est le cas notamment de la Ferme Chapeau Melon, à l’Ange-Gardien en Outaouais, où le producteur François Biron a construit une serre dans une serre. Selon ce dernier, « il faut simplement comprendre quel est le facteur limitant pour la croissance de la plante et s’organiser pour le contourner à moindre coût ».

Ces techniques de production ont également permis l’essor de cultures émergentes. Des agriculteurs font désormais pousser du gingembre, du curcuma et de la patate douce. Ce sont des cultures qui demandent beaucoup de chaleur et en les abritant durant l’été, on comble ce besoin.

D’ailleurs, afin de répondre aux questions agronomiques des producteurs maraîchers entourant les cultures de climat frais, le Centre d’expertise et de transfert en agriculture biologique et de proximité (CETAB+) s’est récemment doté de deux nouvelles serres, installées à l’Institut national d’agriculture biologique (INAB) du Cégep de Victoriaville. Un premier projet est en cours, ayant pour but d’évaluer le nombre de jours à maturité et le rendement pour les cultures les plus populaires en productions d’automne et d’hiver, ainsi que la rentabilité du chauffage minimal. 

Avec toutes ces nouvelles techniques de production, on est en droit d’espérer une plus grande diversité et un approvisionnement continu de produits frais et locaux sur le marché. 

Pierre-Antoine Gilbert, M.Sc., enseignant à l’Institut national d’agriculture biologique
Charlotte Giard-Laliberté, AGR., M.SC., chargée de projet  de recherche en production maraîchère bio au CETAB+