Vie rurale 6 novembre 2019

Une journaliste de La Terre récompensée

La journaliste Josianne Desjardins a remporté le prix Rosaline-Ledoux pour son article La quête d’une fromagère en deuil, qui retrace le parcours de Caroline Tardif, de la Fromagerie Ruban bleu, depuis le suicide de son conjoint, Jean-François Hébert.

Remis lors du Gala Saturne des Agricultrices du Québec à Victoriaville le 26 octobre, le prix vise à encourager l’excellence dans la couverture journalistique de la vie des femmes en milieu rural.

Dans un discours rempli d’émotions, Mme  Desjardins a souligné l’importance d’aborder des sujets de santé psychologique, en plus de remercier la protagoniste de son article. « Caroline Tardif a eu le courage de témoigner à propos d’un sujet sensible, encore tabou, le suicide de son conjoint, a confié la journaliste. Elle a eu le courage de dire qu’il faut continuer à rapporter la détresse, à être à l’écoute des signes de ses proches. »

Des nouvelles de Caroline Tardif

Sur la scène, Josianne Desjardins a également donné des nouvelles de la fromagère. Voici les mots de Caroline Tardif.

« J’ai envie de dire que je refais tout doucement surface. J’accepte ma fragilité émotive de mieux en mieux, mais c’est encore très difficile. Chaque journée est une surprise, car certaines situations, parfois banales, me rappellent un moment avec JF et me bouleversent. Pour une personne comme moi qui étais en contrôle de mes émotions, je vivais mes crises de douleur comme un signe de faiblesse et je me jugeais constamment. J’ai vécu beaucoup d’anxiété et les six premiers mois, je ne dormais plus. J’ai même parfois détesté mon entreprise qui ne me permettait pas de vivre mon deuil comme les gens “normaux”. Je devais être en poste et sourire devant les clients. J’avais tellement de rage à l’intérieur. La paperasse du décès, les inspections du MAPAQ [ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec] et les obligations de toutes sortes me rendaient la vie très difficile. Je ne sais même pas comment j’ai pu survivre et comment les employés ont fait pour rester avec moi alors que je n’étais qu’un zombie sur le pilote automatique. Je faisais le minimum. Ensuite, plein d’anges sont venus m’aider. Emploi-Québec, Desjardins, ma famille, mes employés et ma belle-famille. Une grande chance! Aujourd’hui, j’ai mal. Je m’ennuie de lui. Tout serait tellement plus facile avec lui à mes côtés, mais j’accepte ma nouvelle vie. »