Il est recommandé d’enlever les refus tous les matins, de fournir un accès aux aliments en tout temps et de stimuler les animaux en servant les rations fréquemment. Photo : Archives/TCN
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La qualité du lait étant étroitement liée à la ration fourragère, une gestion adéquate du champ jusqu’à la gueule de l’animal peut s’avérer une stratégie payante pour les producteurs. Un spécialiste de la question partage avec nous quelques conseils.
Si on juge souvent de la qualité du lait en fonction des cellules somatiques et du décompte de bactéries totales, d’autres éléments comme l’absence de spores butyriques, le test de gras et le test de protéines sont à considérer, rappelle Jean-Philippe Laroche, agronome et expert en production laitière, nutrition et fourrages chez Lactanet. « Dans le cas des fromagers, tous ces éléments sont importants. Si on est capable d’améliorer chacun de ces aspects, on va augmenter le rendement fromager par kilo de lait. »
Plusieurs impacts sur la qualité du lait
La fermentation des fourrages dans le rumen favorise la production d’acétate, qui est un précurseur important du gras produit par la glande mammaire. « Plus la vache mange de fourrages, plus elle sera en mesure de fabriquer du gras à partir de l’acétate », explique l’agronome, qui donnait une présentation sur le sujet aux Journées à foin du Conseil québécois des plantes fourragères, en septembre.
Une ration fourragère favorise aussi la santé ruminale, ce qui aura un effet bénéfique sur la synthèse de protéines microbiennes, qui sont hautement digestibles et ont un profil en acide aminé de qualité, constituant une source idéale pour la synthèse de protéines dans le lait, poursuit Jean-Philippe Laroche.
Enfin, la qualité des fourrages a une incidence significative sur la concentration de spores butyriques liés à la bactérie Clostridium. « Puisque c’est une bactérie qui n’est pas détruite par la pasteurisation, certains fromages comme le gouda ou le Louis d’Or sont à risque de gonflement tardif et vont dégager des odeurs désagréables. À moins d’avoir une hygiène exemplaire, il est très difficile de préserver l’ensilage de toute contamination. Par conséquent, des fromagers vont décider de nourrir uniquement leur troupeau avec du foin sec. ».
Défi : augmenter la consommation de MS
Pour obtenir les bénéfices liés aux fourrages, l’expert recommande une consommation d’au moins 16 kg de matière sèche (MS) par jour. Si on veut atteindre cet objectif, il faut travailler sur toutes les sphères de la ferme à commencer par la digestibilité des fourrages, considérée par Jean-Philippe Laroche comme le « nerf de la guerre ». « Si on améliore de 1 unité de pourcentage la NDF (fibres au détergent neutre), on va augmenter la consommation de matière sèche de 0,17 kg MS/j, ce qui représente une hausse de 0,25 kg de lait corrigé MG », illustre-t-il.
Cibler 30 % d’ADF
Le principal élément de contrôle de la digestibilité est le stade de maturité. L’outil NUTRI-Fourrager du CRAAQ, qui permet de prédire la valeur nutritive des fourrages au moment où ils seront coupés, s’avère très utile à cet effet, mentionne au passage Jean-Philippe Laroche. « L’objectif est de viser 30 % d’ADF (fibres au détergent acide). Si on utilise la NDF comme référence, on cherche un taux de 40 % avec les légumineuses et de 50 % avec les graminées. »
Une fauche vers 18 heures
Les herbivores préfèrent les fourrages sucrés. La teneur maximale en sucre est atteinte vers 18 heures, lorsque les plantes ont eu le temps de refaire leurs réserves de sucre durant la journée grâce à la photosynthèse. Il est donc préférable de faucher à ce moment précis de la journée, si possible.
Faire des andains larges
Réduire le temps entre la fauche et l’entreposage constitue un autre moyen de maximiser la teneur en sucre, puisque la plante va continuer à absorber une partie de sa valeur nutritive tant qu’elle ne sera pas en absence d’oxygène ou suffisamment sèche. « Il est donc conseillé de faire des andains larges, soit plus grands que 80 % de la largeur de la barre de coupe », suggère Jean-Philippe Laroche.
Minimiser le niveau de cendres
Puisque les cendres ne fournissent aucune énergie, elles ne devraient jamais dépasser les 10 % du mélange de fourrage, sans quoi la performance des animaux en sera affectée. Parmi les moyens de minimiser leur niveau, mentionnons une hauteur de coupe de 10 cm, l’utilisation d’une faucheuse à couteaux plats et un ajustement de la vitesse de l’équipement de récolte. « Si on récolte trop vite avec une presse à balles carrées, le fourrage aura le temps de se retrouver sous la presse avant de remonter sur la table de l’appareil. Donc le fourrage sera frotté au sol avant d’être gobé, ce qu’on veut éviter », illustre-t-il.
Conserver la qualité
Afin d’augmenter la consommation de matière sèche, on veillera aussi à préserver la qualité des aliments, souligne Jean-Philippe Laroche. « Les spores butyriques liés à la bactérie Clostridium, et associés à une mauvaise fermentation des ensilages par exemple, entraînent une perte de la matière sèche et des nutriments. » Le producteur pourra reconnaîtra l’abondance de Clostridium à certains signes comme la couleur olive de l’ensilage, une odeur de beurre ranci ou de poisson. « La façon la plus simple de détecter la bactérie est de vérifier la présence d’acide butyrique. Mais attention, un ensilage exempt d’acide butyrique peut quand même contenir du Clostridium. Enfin, on reconnaîtra une contamination à Clostridium à la présence élevée d’ammoniaque dans l’ensilage », ajoute l’expert. Ainsi, le niveau d’acide butyrique devrait demeurer inférieur à 0,3 % et l’ammoniaque sous la barre de 15 % de la protéine. Pour minimiser ce problème, on accorde une importance particulière à limiter la contamination par le sol, à récolter un ensilage pas trop humide (idéalement 35 % MS ou plus) ou encore à maintenir un pH de l’ensilage suffisamment acide, notamment par l’utilisation d’un inoculant homofermentaire.