Actualités 25 mai 2016

Tromper le carpocapse pour sauver les pommiers

Une nouvelle série de reportages

Durant toute la période estivale, La Terre de chez nous vous propose une série de reportages sur la lutte intégrée au Québec. Cette approche agroenvironnementale, qui prend de l’ampleur chez nous, mise sur l’environnement pour la gestion et la rentabilisation des cultures. Cette méthode, qui repose essentiellement sur l’observation et l’expérimentation, s’est révélée si efficace qu’elle est vite devenue une solution de remplacement sérieuse aux pratiques habituelles de lutte contre les ennemis des cultures dans plusieurs pays.

Au programme, il y a cinq projets d’avenir, de même que leurs acteurs : la confusion sexuelle du carpocapse de la pomme, la mouche stérile de l’oignon, le trichogramme du maïs sucré, l’usage raisonné des néonicotinoïdes, ainsi que celui de l’atrazine. Bonne lecture!

 


 

HEMMINGFORD — Hubert Philion aime être sur la ligne de front. Pomiculteurs de père en fils depuis six générations, les propriétaires des Vergers écologiques Philion ont toujours eu à cœur leurs cultures, mais aussi l’environnement. Depuis 35 ans, ils s’associent à des projets pilotes qui vont dans le sens de leurs objectifs : produire des fruits de la meilleure qualité possible, tout en causant un minimum de dommages à l’environnement.

En 2013, Daniel Cormier et son projet de recherche sur la confusion sexuelle ont donné à Hubert Philion une solution aux problèmes que lui causait le carpocapse.

Hubert Philion installe un diffuseur avec des gants afin de ne pas boucher les pores par lesquels les phéromones sont diffusées.
Hubert Philion installe un diffuseur avec des gants afin de ne pas boucher les pores par lesquels les phéromones sont diffusées.

Des carpocapses confus

La confusion sexuelle du carpocapse est induite par des tiges doubles qui diffusent des phéromones synthétiques semblables à celles de la femelle. On suspend les
diffuseurs dans le tiers supérieur de l’arbre juste avant la floraison afin d’éviter qu’ils restent coincés dans les bouquets. Lorsqu’un mâle vole à proximité du verger, les diffuseurs l’empêchent de localiser les femelles, ce qui prévient l’accouplement. « Quand c’est bien établi, la confusion sexuelle devient la méthode
de base, et l’insecticide, l’alternative », indique, enthousiaste, Évelyne Barriault, conseillère en pomiculture.

C’est cher, mais…

« Un producteur qui utilisait la confusion sexuelle m’a déjà dit que même si c’était plus cher, ça lui permettait au moins de dormir sur ses deux oreilles », lance en riant le chercheur Daniel Cormier. En effet, la technique rend la gestion de l’insecte beaucoup plus facile, puisqu’il n’y a pas lieu de se soucier du stade de vie du carpocapse. De plus, comme l’application d’insecticide est réduite et parfois même superflue, les délais stricts à respecter entre l’usage de pesticides et la récolte ne sont plus requis.

Une aide financière est aussi offerte par le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec afin de pallier les frais supplémentaires engendrés par la première année d’essai pendant laquelle la confusion sexuelle doit être utilisée avec un traitement insecticide.Mais pour Hubert Philion, l’adhésion aux techniques de lutte intégrée passe d’abord par l’éducation.

« C’est dans la nature des gens d’être réfractaires au changement. Alors d’avoir un club d’encadrement technique, c’est quelque chose que le gouvernement se doit d’appuyer pour changer les anciennes manières de penser. »

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Les diffuseurs sont regroupés en paquets de 400 et doivent être tenus au froid. Si certains ne sont pas utilisés, ils peuvent être congelés pour l’an prochain.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

L’ennemi à vaincre

Le carpocapse de la pomme fait partie de la famille des papillons (lépidoptères). Vers la mi-juin, les mâles et les femelles s’accouplent et ces dernières vont par la suite déposer leurs œufs sur les pommes ou à proximité. Dès l’éclosion des œufs, les larves commencent à se creuser un chemin vers le centre de la pomme. Puis, lorsque le fruit arrive à maturité, la larve en sort pour aller s’installer sous l’écorce de l’arbre.

Les vergers écologiques Philion

Établis à Hemmingford, les Vergers écologiques Philion accueillent des visiteurs pour l’autocueillette depuis déjà plus de 30 ans. Dans le verger de cinq hectares, on retrouve pas moins de 5 000 pommiers et 1 000 poiriers. L’entreprise d’Hubert Philion propose également du cidre et du poiré artisanaux, en plus de l’autocueillette automnale.