Politique 30 janvier 2019

« Un triste jour pour l’agronomie »

En révélant qu’un agronome du MAPAQ s’était fait congédier pour avoir parlé aux médias, Radio-Canada a créé une véritable onde de choc dans le milieu. Le ministre de l’Agriculture, André Lamontagne, a joué un rôle de premier plan dans cette décision.

Si le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ) a confirmé à La Terre la suspension de deux de ses agronomes et le congédiement d’un troisième, il refuse de mentionner de qui il s’agit ni la ou les raisons de ces sanctions.

C’est le Syndicat des professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec qui affirme que l’agronome congédié est Louis Robert. D’après le Syndicat, cet expert en grandes cultures a été démis de ses fonctions pour avoir fourni des renseignements confidentiels à un média. Ces renseignements divulgués en mars 2018 dénonçaient l’ingérence du secteur privé dans les recherches sur l’utilisation des pesticides réalisées au Centre de recherche sur les grains (CÉROM), des recherches financées en grande partie par le MAPAQ. Quant aux deux agronomes suspendus, dont l’un travaillait au bureau de Saint-Hyacinthe, ils auraient été sanctionnés pour avoir notamment parlé à un journaliste de La Terre de chez nous, a aussi révélé Radio-Canada.

Triste jour

Ce congédiement, c’est « un triste jour pour l’agronomie », affirme l’agronome Samuel Comtois. Ce dernier a beaucoup de respect pour ce que Louis Robert a fait. « Sans lui, l’histoire du CÉROM n’aurait pas éclaté, dit-il. C’est important que quelqu’un se tienne debout quand ça concerne les fonds publics. »

Celui qui a été président de l’Association des conseillers en agroenvironnement du Québec de 2008 à 2011 et qui a également siégé à l’Ordre des agronomes du Québec affirme que le MAPAQ est soumis à une forte pression de l’industrie, ajoutant que la direction du ministère « contrôle le message » de tout son personnel. « Au lieu de perdre leur temps à museler leurs agronomes, les dirigeants du MAPAQ devraient mettre leurs efforts au service de l’agriculture et diminuer la paperasse imposée aux agriculteurs », a commenté M. Comtois.

Le relationniste du MAPAQ Yohan Dallaire Boily affirme que le ministère ne défend pas aux agronomes de parler avec les journalistes, pourvu que toute demande média passe par le service des communications.

Le ministre impliqué

En mêlée de presse le 30 janvier, le ministre André Lamontagne a révélé avoir « personnellement autorisé » le licenciement de l’agronome Louis Robert. Cette affirmation offusque Richard Perron, président du Syndicat des professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec. « Je n’en reviens pas que le ministre soit intervenu de la sorte, lance-t-il. Personne du ministère à l’interne n’a le droit de dire quoi que ce soit. L’image du ministère est plus importante que la santé des gens et la gestion des fonds publics. C’est profondément inquiétant. »