Politique 29 novembre 2022

« L’autonomie agricole, c’est non négociable »

QUÉBEC – Lors de son discours au congrès général de l’Union des producteurs agricoles (UPA), le président Martin Caron a défendu l’importance de l’autonomie des agriculteurs dans leur ferme, ce qui a soulevé les applaudissements des délégués réunis à Québec. « L’autonomie des producteurs et productrices agricoles, c’est non négociable », a-t-il affirmé en réaction au projet de loi 41 visant à empêcher les agronomes de conseiller et de vendre simultanément des intrants aux producteurs agricoles. Il a également brossé un portrait préoccupant de l’agriculture au Québec.

Le président de l’UPA estime que le projet de loi 41, qu’il s’attend à voir redéposé à l’Assemblée nationale, met à mal la capacité des agriculteurs à gérer leurs entreprises. « Ils ont omis de nous exempter. Ça veut dire que chaque jour qu’on faisait des actes sur nos entreprises, c’est comme si on avait besoin [de quelqu’un] qui nous dise de le faire. Que ce soit pour la gestion économique ou pour nos animaux, la gestion de nos cultures, pour nos prévisions de traitement et ainsi de suite », a-t-il énuméré. Les recommandations de la commission de l’agriculture sur l’impact des pesticides au Québec ne faisaient nullement mention de l’autonomie des producteurs agricoles, a ajouté le président. « Pourquoi on sort un projet de loi comme ça et qu’on est en train de nous attacher? »

Martin Caron a souligné que 52 % des transactions foncières en zone agricole ont été effectuées par des non-agriculteurs durant les 10 dernières années. Photo : Vincent Cauchy / TCN
Martin Caron a souligné que 52 % des transactions foncières en zone agricole ont été effectuées par des non-agriculteurs durant les 10 dernières années. Photo : Vincent Cauchy / TCN

Une terre sur deux vendue à un non-agriculteur

Martin Caron a souligné que 52 % des transactions foncières en zone agricole ont été effectuées par des non-agriculteurs durant les 10 dernières années. Le chiffre se situait à 23 % précédemment. « Concrètement, ça veut dire que la majorité des terres sont achetées par des non-agriculteurs. Ça veut dire qu’une terre sur deux est vendue à un non-agriculteur », a indiqué le président de l’UPA.

La hausse du prix des terres freine également les projets et les agrandissements de ferme. Selon les chiffres présentés par M. Caron, une terre valait en moyenne 11 700 $ l’hectare en 2012, alors qu’elle en valait 28 600 $ l’hectare en 2021.

La zone agricole continue par ailleurs de perdre en superficie au profit de la zone blanche ou des terres agricoles à utilisation non agricole. En cinq ans, 9 583 hectares ont été cédés, alors que la superficie des terres cédées représente 24 821 hectares depuis 10 ans.

Les marges de profit en diminution

La hausse du coût des intrants occasionnée par l’inflation affecte directement les recettes monétaires des producteurs, a fait valoir Martin Caron. En 2017, un producteur pouvait obtenir une marge de profit de 11,7 ¢ par dollar, alors qu’en 2022, le profit est à 9 ¢ par dollar. « Il y a un manque à gagner », mentionne le dirigeant.

Grâce à l’agro-indicateur de La Financière, l’UPA prévoit en 2022 des recettes monétaires agricoles de 12,66 G$. « En 5 ans, pour faire 13 % plus de revenus nets, il faudra vendre 47 % de plus, dépenser 51 % de plus et s’endetter 61 % de plus », a rapporté M. Caron. 

Par comparaison, il a souligné que les voisins américains avaient injecté 4 G$ en subventions directes aux producteurs au mois d’août pour contrer l’inflation.