Politique 26 septembre 2019

Auditions de la CAPERN – Jour 4

Les auditions de la Commission de l’agriculture, des pêcheries, de l’énergie et des ressources naturelles (CAPERN) se sont amorcées le 23 septembre à Québec. L’objectif est d’examiner les impacts des pesticides sur la santé publique et l’environnement. La Terre est sur place.

Résumé de l’intervention de l’UPA

Devant les membres de la Commission, le président de l’Union des producteurs agricoles (UPA), Marcel Groleau, a rappelé que les producteurs devront être au cœur des changements à venir en matière de pesticides.

Selon lui, la prescription agronomique ne réduira pas l’utilisation des pesticides par les producteurs si elle n’est pas intégrée dans son plan de culture et de fertilisation. « Transférer la gestion des pesticides à l’Ordre des agronomes du Québec comme le président proposait cette semaine serait une grave erreur. […] La mission d’un ordre professionnel est de protéger ses citoyens au regard de l’exercice de la profession seulement. Elle ne consiste pas à réglementer les activités du secteur dans lequel cette profession est exercée », a-t-il dit. Il propose, par le biais du plan vert, un accompagnement des producteurs dans leur gestion des cultures plutôt que des conseils sur la gestion des pesticides uniquement. L’UPA estime les investissements actuels du Québec en agroenvironnement, en recherche et en soutien à des programmes à 40 M$ par année. L’organisme estime qu’avec 60 M$ supplémentaires sur 10 ans, « on peut faire beaucoup ». Marcel Groleau a affirmé aux parlementaires que le ministère l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ) devait aussi réengager des agronomes pour augmenter son offre de services agronomique.

À ses côtés, le premier vice-président de l’UPA, Martin Caron, s’est dit en faveur de cartographies des épandages de pesticides pour en faire un portrait provincial. Il propose de bonifier l’outil SAgE pesticides et d’envoyer les données amassées aux ministères afin de mesurer les effets des pesticides sur la santé et l’environnement. Sensible à la question des maladies professionnelles, l’UPA a indiqué aux parlementaires qu’elle travaillait en collaboration avec Parkinson Québec pour créer un répertoire agricole des personnes affectées par la maladie.


Résumé de l’intervention de l’ACME

La mécanique d’homologation de l’Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire (ARLA) a monopolisé l’attention des membres de la commission par le médecin en soins palliatifs de l’Association canadienne des médecins pour l’environnement (ACME), Jean Zigby. Selon lui, il y a un conflit d’intérêts « flagrant » dans le fait que l’Agence ne se base pas sur des études indépendantes autant que celles fournies par l’industrie pour homologuer un produit.

En France, certaines maladies comme le Parkinson ont été reconnues comme des maladies professionnelles pour ceux qui ont travaillé avec les pesticides pendant cinq ans. Est-ce que ça devrait l’être au Québec? « D’après moi, oui. Je sais qu’il va toujours y avoir une certaine inconnue dans les évidences [qui lient les maladies aux pesticides], mais la maladie de Parkinson est l’une des plus robustes [documentées] dans la littérature », a souligné Jean Zigby.


Résumé de l’intervention de Parkinson Québec

« L’exposition aux pesticides double les chances d’avoir la maladie de Parkinson », a indiqué Romain Rigal, le coordonnateur au développement des programmes de Parkinson Québec, accompagné du producteur Serge Giard et de l’agronome Gérald Chouinard, tous deux atteints de la maladie. Sur 40 000 producteurs, 30 000 ne cotisent pas à la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) puisqu’ils sont des travailleurs autonomes. Parkinson Québec souhaite, pour ceux qui cotisent, que cette affection soit reconnue comme une maladie professionnelle et pour ceux qui ne cotisent pas, qu’ils soient dédommagés par la mise sur pied d’un fonds d’indemnisation. En commission, M. Chouinard et Giard ont indiqué être en train de créer un regroupement de producteurs atteints de la maladie.


Résumé de l’intervention de Jacques Brodeur, professeur de sciences biologiques de l’Université de Montréal et directeur de l’IRBV

« On applique 23,3 traitements de pesticides en moyenne par année dans un verger au Québec », a indiqué Jacques Brodeur, professeur de sciences biologiques de l’Université de Montréal et directeur de l’Institut de recherche en biologie végétale (IRBV) – lutte biologique aux insectes, aux parlementaires. Il est cependant conscient que cultiver des pommes au Québec est un défi, compte tenu de la diversité des problèmes phytosanitaires et que dans ce domaine, la production biologique est encore marginale. Il précise que ces pommes bio reçoivent aussi plusieurs traitements de biopesticides, jumelés à d’autres méthodes de lutte intégrée comme la confusion sexuelle pour lutter contre le carpocapse. Cependant, « les pommes bio sont plus saines », a-t-il indiqué.

Sur l’apparence de conflit d’intérêts des agronomes liés à l’industrie, le système de « médecin-pharmacien » devrait être priorisé, selon lui. Ceux qui produisent et vendent des pesticides ne devraient pas être les mêmes que ceux qui dispensent des conseils.


Résumé de l’intervention de l’Union paysanne

Si le président et cofondateur de l’Union paysanne, Maxime Laplante, avait une seule recommandation à faire aux parlementaires, il prioriserait la liberté d’association. « Je ne me sens pas représenté par l’Union des producteurs agricoles du Québec […] et les agriculteurs du Québec n’ont même pas le droit de la liberté d’association », a indiqué Maxime Laplante.  L’Union paysanne recommande aussi aux  parlementaires de créer une division au MAPAQ dédiée à la diversité de l’agriculture et de repenser le financement de la production agricole.

Maxime Laplante, président et Marie-Josée Renaud, coordonnatrice de l'Union paysanne ont pris la parole en cette quatrième journée d'auditions.
Maxime Laplante, président, et Marie-Josée Renaud, coordonnatrice de l’Union paysanne, ont pris la parole en cette quatrième journée d’auditions.

Résumé de l’intervention du PELI du Centre local de développement des Jardins-de-Napierville

Le président du Pôle d’excellence en lutte intégrée (PELI) et producteur, Jocelyn Leclair, a expliqué que le dépistage est très important en lutte intégrée, mais qu’il faut poursuivre la recherche pour chacun des ravageurs et chacune des maladies dans chaque production. Cet exercice est long, laborieux et doit être financé. Les deux producteurs qui l’accompagnaient, Jean-Bernard et Denys VanWinden ont, pour leur part, expliqué que les biopesticides ne sont pas aussi inoffensifs que ce à quoi les parlementaires peuvent s’attendre. « Ce n’est pas parce qu’un produit est biologique qu’il n’est pas toxique. Il faut veiller à ce que les produits suivent toute la gamme d’homologation à l’ARLA, mais c’est vrai qu’il y a moins de risques pour la santé et l’environnement », a indiqué Jean-Bernard Van Winden.

Photo : Myriam Laplante El Haïli.
Photo : Myriam Laplante El Haïli/TCN

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