Page conseils 30 mars 2020

La résistance aux antibiotiques, un phénomène très problématique

La résistance des bactéries aux antibiotiques est une problématique d’ordre international préoccupante, tant pour les humains que pour les animaux. Afin de maintenir l’efficacité des antibiotiques, leur utilisation a été restreinte en production animale au cours des dernières années. Il ne fait aucun doute que leur usage doit être réfléchi et judicieux afin de limiter la résistance de certains pathogènes à l’égard des antibiotiques d’importance en médecine humaine et vétérinaire.

La réduction de l’usage des antibiotiques en élevage passe en premier lieu par la prévention des maladies infectieuses. Ce point est particulièrement important et inclut notamment une alimentation répondant aux besoins nutritionnels et des conditions d’ambiance et de logement appropriées, qui favorisent le bien-être animal. Des mesures de biosécurité efficaces contribuent aussi à la prévention des maladies infectieuses. Enfin, l’utilisation de solutions de rechange antimicrobiennes permettra également de réduire l’utilisation des antibiotiques.

Depuis plusieurs décennies, les antibiotiques ont été largement utilisés en production animale. Ces derniers ont été et sont employés à des fins thérapeutiques, mais également en prophylaxie afin de prévenir les maladies infectieuses.

Croissance et santé globale

Antérieurement, certains antibiotiques étaient ajoutés à de faibles concentrations aux aliments des animaux d’élevage afin de promouvoir leur développement. Cet usage comme facteur de croissance en production porcine et avicole n’est maintenant plus pratiqué au Québec. Afin de pallier cette restriction concernant l’utilisation des antibiotiques, beaucoup d’efforts de recherche ont été déployés afin de découvrir des antimicrobiens de remplacement et des stratégies d’amélioration de la robustesse et de la santé globale des porcs et des poulets.

Plusieurs types d’additifs alimentaires tels que les probiotiques, les prébiotiques et glucides complexes, les vitamines et minéraux, les huiles essentielles, les extraits de plantes, les acidifiants et les acides gras à courte chaîne sont actuellement utilisés seuls ou en combinaisons en alimentation animale dans le but de soutenir la santé intestinale, de moduler le microbiote et de prévenir certaines conditions pathologiques.

Du côté des thérapies de rechange aux antibiotiques, certaines pourraient représenter un potentiel dans le futur. La phagothérapie, qui consiste à utiliser des phages virulents comme agents antibactériens (bactériophages), est une approche vieille de plus d’un siècle qui revient en force depuis quelques années. Un autre type de thérapie est celle qui consiste à utiliser des peptides (petites chaînes d’acides aminés) antimicrobiens produits par des organismes notamment les bactéries (bactériocines), les champignons, les insectes, les amphibiens et les mammifères. Une autre approche se base sur des molécules permettant d’interférer dans la communication bactérienne. En effet, les bactéries communiquent entre elles par l’entremise de molécules bien spécifiques qu’elles produisent et qui permettent de synchroniser l’expression de certains gènes contrôlant des fonctions, dont la virulence. La synthèse et l’administration de molécules permettant d’inhiber ou de perturber cette communication pourraient donc, dans le futur, être utilisées en combinaison avec d’autres thérapies et devenir une solution de remplacement des antibiotiques. La recherche et l’innovation permettront de déterminer de nouvelles stratégies.

La complémentarité des compétences de l’agronome et de celles du médecin vétérinaire est nécessaire afin de gérer la problématique d’antibiorésistance et d’améliorer la santé et la robustesse des animaux d’élevage.

Antibiorésistance

Aujourd’hui, plusieurs bactéries ont développé une capacité de résister à des antibiotiques. Certaines sont même résistantes à tous les antibiotiques connus. L’antibiorésistance n’est pas un phénomène nouveau. Les bactéries sont capables de résister aux antibiotiques produits naturellement par d’autres bactéries ou champignons depuis la nuit des temps et l’utilisation plus intensive des antibiotiques au cours des dernières décennies a contribué à une sélection de bactéries multirésistantes qui est maintenant très problématique.

Yan Martel-Kennes, doctorant, M. Sc., agronome, Centre de recherche en sciences animales de Deschambault