Bio 20 mars 2022

Une transition « à 150 % positive » vers le bio

SAINT-ANSELME Quand Caroline Allen a pris seule la relève de la ferme familiale en 2014, certains choix ont dû être faits, dont l’achat d’un robot de traite pour faciliter la gestion du troupeau et ainsi poursuivre sans s’épuiser le travail amorcé par son arrière-arrière-grand-père en 1945.

Fiche technique

Nom de la ferme
Ferme Jacal

Spécialité
Ferme laitière biologique

Année de fondation
1945

Noms des propriétaires
Caroline Allen, Jacques Allen

Nombre de générations
4

Superficie en culture
56 hectares de foins,
20 hectares de forêts

Cheptel
45 vaches

Pendant sa tournée, la propriétaire de la Ferme Jacal, Caroline Allen, pointe le robot de traite installé lors de l’agrandissement de la ferme laitière en 2019. « Ce robot a changé ma vie et sauvé ma santé », lance d’emblée la productrice, qui est également mère de trois enfants de 5, 9 et 15 ans. Caroline travaillait à la ferme familiale depuis 2009, mais lorsqu’elle a décidé de prendre la relève en 2014, son père Jacques a continué de travailler avec elle quelques années pour assurer une bonne transition. Ils ont alors amorcé une série de changements, dont un agrandissement et l’achat d’un robot de traite pour lui permettre de travailler seule et de simplifier au maximum les tâches. « Je ne pense pas que ce soit parce que je suis une femme qu’on ait choisi d’aller dans cette direction, ­souligne-t-elle. Si ça avait été mon frère qui avait pris la relève, on aurait probablement fait les mêmes choix, parce qu’on était tous rendus là, et mon père n’a plus l’énergie qu’il avait avant. »

Depuis les dernières années, son père n’a d’ailleurs plus le droit d’entrer dans la ferme afin de laisser la voie libre à sa fille, « sauf quand il vient jouer avec les enfants », spécifie Caroline. Il reste toutefois impliqué dans l’entreprise en ­s’occupant encore de certains travaux au champ.

Une transition bénéfique « sur tous les points »

La conversion vers la production de lait biologique, pour laquelle la ferme a obtenu sa certification en novembre 2020, est toutefois le projet de Caroline, qui cherchait un mode de gestion correspondant mieux à ses valeurs. « Je n’ai jamais aimé les vaches attachées. Quand on a converti pour la stabulation libre et mis le robot de traite en service, ç’a été une grosse année de transition, mais ça en valait la peine, résume-t-elle. Pour moi, le bio et tout ce que ça implique, ça n’a eu que du positif. » Elle signale par exemple que « ses filles », dénominatif affectueux qu’elle utilise pour parler de ses 45 vaches de race Holstein, sont beaucoup plus calmes depuis qu’elles sont libres.

Caroline Allen avec ses trois enfants :  Hélèna (15 ans), Louis-Raymond (9 ans) et Clara (5 ans), qui adorent donner un coup de main à la ferme. Photo : Gracieuseté de Caroline Allen
Caroline Allen avec ses trois enfants : Hélèna (15 ans), Louis-Raymond (9 ans) et Clara (5 ans), qui adorent donner un coup de main à la ferme. Photo : Gracieuseté de Caroline Allen

« J’ai aussi un meilleur contact avec elles et je ne les ai jamais vues agressives. Même le vêlage est plus simple. Je leur fais confiance. » Propulsée par ces réussites et constatant que sa charge de travail est moins lourde quand ses animaux sont bien, la productrice prévoit d’autres changements dans les prochains mois. Elle envisage entre autres d’exploiter davantage le pâturage puisqu’elle remarque que « ses filles » aiment sortir dehors pendant l’été. Elle commence aussi à s’intéresser à la nouvelle mode des vaches nourricières.

L’aventure de la fromagerie

Les changements ne s’arrêtent pas là. La famille Allen s’apprête à réaliser un rêve qu’elle caressait depuis de nombreuses années, soit celui d’ouvrir une fromagerie pour tirer un meilleur profit du lait bio produit par la ferme. L’ouverture de la nouvelle installation, dotée de l’équipement de fabrication de fromage et d’un comptoir de vente, est prévue ce printemps. L’entreprise sera gérée indépendamment par Joseph Allen, le frère de Caroline. « On va commencer avec la fabrication du cheddar biologique et de fromage en crottes », spécifie Joseph, rencontré alors qu’il terminait les travaux du bâtiment où logera le commerce à Saint-Anselme. N’ayant jamais souhaité prendre la relève de la ferme laitière, il voit dans cette nouvelle aventure une manière de participer à l’entreprise familiale. 

Joseph Allen fait les derniers travaux à la nouvelle fromagerie, qui ouvrira ce printemps.
Joseph Allen fait les derniers travaux à la nouvelle fromagerie, qui ouvrira ce printemps.

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Faire les bons choix

En simplifiant les tâches au maximum et en misant sur l’efficacité de chaque geste posé, Caroline Allen arrive à mieux gérer son temps et à moins travailler.

Être en paix avec soi-même

En prenant du temps pour elle, la productrice dit être plus calme pour observer ses vaches, prendre de meilleures décisions et ainsi être plus alerte lorsqu’il y a une manœuvre importante à faire, ce qui a un impact sur le bien-être de son troupeau. Elle insiste d’ailleurs sur l’importance de se changer les idées, en allant par exemple faire du sport. « Des fois, on ne force pas ben ben fort, mais on jase, et ça fait du bien », dit-elle.

Coopérer avec les membres de la famille

Pour garder les enfants, qu’elle n’a jamais envoyés à la garderie, la productrice a fait appel à son réseau familial, dont plusieurs de ses tantes qui habitent autour.

Donner des tâches « à forfait »

Puisqu’elle n’a ni le temps ni la force physique de tout faire seule, la productrice fait appel à ses voisins agriculteurs pour donner des tâches « à forfait », dont plusieurs travaux au champ.


Le bon coup de l’entreprise

Lors du passage de La Terre le 4 mars, Caroline Allen venait d’apprendre que les Producteurs de lait du Québec lui avaient décerné la 3e place du concours Lait’Xcellent Bio 2021, récompensant la qualité de son lait biologique. Quand on lui demande quelle a été sa recette pour cette performance, la productrice reste un moment méditative avant d’attribuer le mérite au calme qui règne dans sa ferme et qui profite à la productivité des vaches et à la qualité du lait. Les critères de sélection pour décerner ce prix reposent d’ailleurs sur des indicateurs qui témoignent de l’état de santé des vaches, entre autres.