Ma famille agricole 17 octobre 2021

Quand rêver d’un monde meilleur devient réalité

Lochaber-Partie-Ouest – Il est fils d’un militaire et est originaire de Nouvelle-Écosse. Elle est fille de médecin et a grandi à Montréal et à Québec. James Thompson et Geneviève Grossenbacher ne semblaient pas destinés à devenir agriculteurs. Pourtant, depuis dix ans, ils exploitent Notre petite ferme, qui produit des légumes biologiques, et rencontrent tout un succès, au point d’être couronnés par le Concours des Jeunes Agriculteurs d’Élite du Canada, section Québec, récemment.

Le couple à la tête de Notre petite ferme l’admet d’emblée : il ne provient pas du milieu agricole et n’a même pas fait d’études dans le domaine. C’est à l’université, alors que James Thompson étudiait en urbanisme et Geneviève Grossenbacher en environnement, que leur est venue l’idée de se lancer dans la production de légumes biologiques.

Fiche technique

Nom de la ferme
Notre petite ferme

Spécialité
Légumes biologiques

Année de fondation
2011

Noms des propriétaires
James Thompson et Geneviève Grossenbacher

Nombre de générations
1re

Superficie en culture
1,75 hectare

« Manger est un des gestes quotidiens qui a le plus d’impact sur notre santé, notre société et notre environnement, illustre Geneviève. On était deux jeunes idéalistes rêvant d’un monde meilleur. On s’est rendu compte que contribuer à nourrir les gens d’ici de façon durable, c’est une manière de créer ce monde meilleur. »

Mais démarrer une production agricole, alors que l’on n’a aucun contact dans le domaine ni fait d’études dans celui-ci, représente tout un défi.

Entre 2005 et 2011, le couple a fait ses devoirs : tous deux sont allés travailler dans une ferme biologique urbaine à Cuba pendant quelques mois. Au retour, James a acquis d’autres connaissances en travaillant chez deux producteurs montréalais de légumes biologiques tout en lisant sur le sujet à temps perdu. Quant à Geneviève, elle a notamment travaillé chez Sème l’avenir (auparavant USC Canada) et Équiterre sur des enjeux en lien avec l’agriculture durable.

Prêt à lancer sa propre production, le duo s’est heurté à la difficulté de mettre la main sur une terre. Obtenir du financement dans ce but a été laborieux puisque le couple ne pouvait pas offrir de garantie financière aux créanciers. C’est alors que James et Geneviève ont découvert la Plateforme agricole de L’Ange-Gardien, près de Buckingham.

Cet incubateur pour les fermes permet d’avoir accès à une terre et à des équipements sans avoir à faire de folles dépenses. « C’est comme avoir un appartement déjà meublé, illustre James. On a pu commencer la production tout de suite et se concentrer sur notre mise en marché. Ç’a été un grand avantage. »

Notre petite ferme a ainsi été créée en 2011 et est restée à la Plateforme agricole jusqu’en 2016. C’est à ce moment que le couple a déménagé sa production dans une ancienne ferme laitière de 68 hectares (ha) à Lochaber-Partie-Ouest et en est devenu propriétaire en 2020, le tout sans mise de fonds ni garantie financière d’un tiers, grâce à l’aide du Fonds d’investissement pour la relève agricole.

Aujourd’hui, Notre petite ferme n’exploite que 1,75 ha de ses terres (dont la moitié est consacrée annuellement à des engrais verts), mais réussit tout de même à fournir hebdomadairement des paniers de huit à douze légumes ­biologiques à 350 familles durant la période estivale. Une trentaine de variétés de légumes sont cultivées chaque année.

En septembre, le couple a remporté le Concours des Jeunes Agriculteurs d’Élite du Canada, section Québec.
En septembre, le couple a remporté le Concours des Jeunes Agriculteurs d’Élite du Canada, section Québec.

Reconnaissance

Malgré la relative petitesse de la superficie de terres cultivées, Notre petite ferme obtient un excellent rendement de production. C’est l’une des raisons qui a fait en sorte que le couple a été lauréat du Concours des Jeunes Agriculteurs d’Élite du Canada, section Québec, en septembre dernier. Cette reconnaissance s’ajoute au Prix de la relève agricole et au titre de Chevalier avec la mention de Grand mérite catégorie bronze de l’Ordre national du mérite agricole, obtenus tous deux en 2018. « On est fiers et reconnaissants, lance James à propos de la plus récente récompense. On a eu un parcours très différent de la majorité des agriculteurs et on espère que ça va déblayer le chemin pour une plus grande relève non apparentée en agriculture. »

Justement, James et Geneviève, qui ont trois fils âgés de 3 à 10 ans, aimeraient que l’un d’eux reprenne la ferme plus tard, mais indiquent ne pas vouloir leur mettre de pression.

« Un point important à préciser est que l’on espère bâtir une entreprise qui soit transférable, peu importe à qui, précise Geneviève. On développe notre ferme activement, en mettant de l’argent dans les infrastructures pour que lorsque viendra le temps de la vendre, ce ne soit pas à la relève de payer ces coûts. »

Le bon coup de l’entreprise

L’emploi d’engrais verts est sans contredit la meilleure décision que James Thompson dit avoir prise. Chacune de ses parcelles, en alternance, est consacrée pendant un an aux engrais verts (pois, seigle ou avoine). Outre le fait de retenir des nutriments dans le sol pour les prochaines cultures, ceci permet aussi de limiter la prolifération des mauvaises herbes lorsque la parcelle est ensuite utilisée pour la production de légumes. « On a ainsi besoin de moins de main-d’œuvre pour désherber et, dans notre domaine, la main-d’œuvre représente des coûts énormes, explique-t-il. Si on peut diminuer ces frais, ça fait une bonne ­différence sur notre marge de profit. » 

5 conseils pour… se lancer dans l’agriculture biologique

Aller chercher de l’expérience et des connaissances

Avant de partir leur propre entreprise agricole, le couple Thompson-Grossenbacher a acquis de l’expérience en travaillant dans d’autres fermes biologiques, ce qui leur a permis d’aller chercher des connaissances dans le domaine grâce au réseautage et à des formations.

Avoir une bonne réputation personnelle

Les gens gravitant dans le monde agricole d’une région se connaissent bien souvent entre eux. Un agriculteur reconnu pour sa gentillesse fera en sorte qu’en cas de besoin, des gens du milieu seront toujours là pour l’épauler.

Écouter les conseils des gens du milieu

Il ne faut pas avoir peur d’aller chercher de l’aide auprès de spécialistes si nous rencontrons des problèmes. James indique demander des conseils lorsque vient le temps d’aller chercher du financement, par exemple.

Avoir une bonne marge de profit

Pour qu’une ferme soit rentable, il n’est pas toujours nécessaire d’augmenter sa production. Baisser ses dépenses ou augmenter ses prix peuvent s’avérer des choix plus judicieux selon les circonstances. Il faut aussi régulièrement garder un œil sur les finances de l’entreprise.

Prendre avantage des programmes offerts

En faisant appel aux programmes financiers offerts par différents organismes, une ferme en démarrage pourra sauver beaucoup d’argent lors de l’achat d’équipements.

Francis Legault, collaboration spéciale