Ma famille agricole 30 janvier 2022

Ils portent les valeurs de leurs ancêtres

SAINTE-HÉLÈNE-DE-MANCEBOURG – Installée dans le petit village de Sainte-Hélène-de-Mancebourg en Abitibi, la famille Morin vit au rythme lent des saisons, portant les valeurs et le courage de trois générations d’agriculteurs et de défricheurs. Les travaux de la Ferme des Mariniers et l’enseignement à la maison meublent le quotidien de cette fratrie solidement enracinée dans son coin de pays.

Fiche technique

Nom de la ferme
Ferme des Mariniers

Spécialité
Bovins de boucherie

Année de fondation
1936

Noms des propriétaires
Richard Morin, Rémi Morin
et Valérie St-Amand

Nombre de générations
3

Superficie en culture
405 hectares 

Cheptel
300 têtes (comprenant les brebis
et les daims)

Quand Rémi raconte l’arrivée sur la terre de ses grands-parents, Hercule et Joséphine, en 1936, on imagine facilement des passages pittoresques du roman Maria Chapdelaine transposés dans le paysage abitibien de la colonisation. Des 100 acres (40,5 hectares) qui lui étaient alloués, Hercule Morin devait en défricher 30 (12 ha) dans les deux premières années de son installation. À cette époque, on pratiquait une agriculture de subsistance avec quelques vaches, des cochons et un cheval. Deux frères d’Hercule, Godias et Gédéon, ont eux aussi, au même moment, fait partie de cette phase de colonisation et se sont établis à Sainte-Hélène.

« Quand mon père, Majoric, a pris la relève, en 1957, avec son frère, Alphège, il a implanté un troupeau laitier », raconte Rémi Morin. Majoric a épousé Ghislaine Coulombe en 1960. Le lait était transformé en crème à l’aide d’un séparateur avant d’être vendu à des beurreries de la région.

Majoric Morin occupait en parallèle un emploi au moulin à scie et comme la famille s’était déjà agrandie de quatre enfants — elle en comptera 12 au total — la traite des vaches à la main était devenue une tâche trop exigeante. Il a donc converti le troupeau en bovins de boucherie. M. Morin a pu quitter son emploi au moulin et se consacrer exclusivement aux travaux de la ferme en 1979.

À partir de 1997, Rémi et son frère Richard ont pris graduellement la relève de leur père à la Ferme des Mariniers. Le troupeau, composé d’une soixantaine de vaches dans les années 1980, compte aujourd’hui 260 têtes en pacage à l’année, dont 30 appartiennent à Valérie St-Amand, l’épouse de Rémi Morin. Une vingtaine de têtes de brebis et une vingtaine de têtes de daims s’ajoutent au troupeau.

Le couple a huit enfants âgés de 4 à 22 ans. « Ils apprennent le travail de la ferme, à respecter la nature et les animaux, mais ils ne sont pas obligés d’effectuer des tâches particulières », souligne M. Morin. Sans savoir de quelle façon, le couple a bon espoir que certains prennent un jour la relève de la ferme.

Le troupeau bovin compte 260 têtes.
Le troupeau bovin compte 260 têtes.

L’école à la maison

Sept des huit enfants (cinq filles et trois garçons) reçoivent la formation scolaire chez eux. L’aîné travaille en journalisme télé. « On a commencé l’école à la maison bien avant la pandémie », raconte Valérie qui a dû s’improviser professeure de la prématernelle jusqu’à la 2e année du secondaire. Des heures sont allouées chaque jour aux travaux scolaires et celles-là sont obligatoires. Par contre, les élèves ne sont pas tenus à un horaire strict comme à l’école conventionnelle. L’enseignement peut se faire à différents moments de la journée et même, en nature, où les jeunes côtoient le troupeau de daims. Ce qui a motivé le couple à proposer cette formule d’enseignement à leurs enfants, c’est surtout qu’avec les différents arrêts, les enfants perdaient deux heures par jour en transport scolaire, note Valérie. Même si certains ont expérimenté les deux formules, ils ont tous préféré étudier en famille et sont beaucoup plus motivés.

Maire de sa municipalité

En plus d’accompagner ses enfants dans leurs apprentissages scolaires, Valérie St-Amand suit elle-même un programme collégial à distance en Gestion d’entreprise agricole. Rémi Morin, pour sa part, est impliqué dans le syndicat local de l’Union des producteurs agricoles secteur Abitibi Ouest depuis une vingtaine d’années, dont quatre ans à la présidence, et a été élu maire de sa municipalité de 380 habitants le 7 novembre dernier. Il affirme que sa seule promesse est d’être à l’écoute des besoins de ses concitoyens.

Malgré tout, souligne Valérie, la famille trouve le temps de se reposer sur la plage privée près du lac Abitibi à 10 minutes de VTT de chez eux et de prendre des vacances en été. « C’est mon frère Richard qui s’occupe alors de la ferme », ajoute Rémi.

Autant à la ferme que dans sa vie familiale et sociale, ce dernier croit que le travail d’équipe est la chose la plus importante. 

Une maman bien fière de son nouveau-né.
Une maman bien fière de son nouveau-né.

Le bon coup de l’entreprise

Rémi Morin et Valérie St-Amand n’ont aucune hésitation : le vêlage au printemps, en pâturage, apporte de nombreux avantages. L’une des premières constatations est que les vaches autant que les veaux sont plus vigoureux. Les petits ont moins de stress à la naissance, ce qui fait qu’ils prennent vite du poids. De plus, il y a beaucoup moins de veaux malades, donc les soins à apporter à la naissance sont moindres. « Nous avons aussi sauvé beaucoup sur la litière, car nous n’en utilisons plus pour les vêlages », souligne le couple. Cette économie représente de deux à trois camions de ripe de moins par année. Rémi et Valérie peuvent en outre faire la tournée des vêlages en VTT au lieu de la faire en tracteurs, ce qui permet de moins endommager le sol. Un peu avant les dernières gelées printanières, ils mettent les balles aux champs pour que les vaches puissent s’alimenter durant le mois de mai, soit pendant leur plus forte concentration de vêlages. 

Équipement utile

Les tuyaux de chaque extrémité forment les réservoirs d’eau permettant aux vaches de boire. Celui du milieu est fermé en tout temps. Il contient une flotte qui guide le niveau de l’eau. Les tuyaux sont isolés à l’uréthane et l’extérieur est en plastique rigide. Le tout profondément enfoui sous six pieds de terre. Les deux pieds restants servent à abreuver les animaux. Il n’y a aucune électricité; l’énergie vient de la chaleur de la terre et du mouvement de l’eau. La pompe dans le puits pousse l’eau dans les réservoirs. Quand la vache boit, l’eau descend et fait ainsi activer le flotteur qui remplit le niveau d’eau au départ.