Actualités 20 juillet 2018

L’urgence foin décrétée au Lac-Saint-Jean et dans le Bas-Saint-Laurent

L’état d’urgence est décrété au Lac-Saint-Jean et dans Bas-Saint-Laurent où, dans cette dernière région seulement, près de 1 000 producteurs laitiers, ovins et bovins manquent désormais de foin pour nourrir leurs bêtes. Durement éprouvés par la sécheresse, plusieurs souffrent de détresse psychologique.

Pour le président de la Fédération de l’UPA du Bas-Saint-Laurent, Gilbert Marquis, c’est une question « de vie ou de mort » et « ce ne sera plus le temps d’agir quand on verra des personnes passer à l’acte ».

Du foin, les producteurs en ont besoin « maintenant ». Le téléphone de M. Marquis et celui du président de la Fédération de l’UPA du Saguenay–Lac-Saint-Jean, Mario Théberge, ne dérougissent pas; c’est la détresse dans le champ. « L’année dernière, il y a eu des suicides », confie M. Marquis. L’un des deux frères propriétaires d’une ferme était passé à l’acte, incapable de surmonter l’épreuve. « Cette année, son frère est découragé aussi », indique M. Marquis. « Nos producteurs sacrifient leurs récoltes pour donner des pâturages aux animaux en ce moment », mentionne M. Théberge. Chez lui, trois MRC sont aussi touchées qu’au Bas-Saint-Laurent, soit celles du Domaine-du-Roy, de Maria-Chapdelaine et Lac-Saint-Jean-Est.

Certains producteurs parlent d’envoyer des vaches en fin de gestation à l’encan. Une situation qui leur crève le cœur.

Opération foin

Les producteurs du Lac-Saint-Jean et du Bas-Saint-Laurent recherchent des fourrages. Conséquemment, une opération foin s’organise sans plus tarder à travers le Québec. « Il y a peut-être des commerçants ou des agriculteurs qui en ont un peu trop [et qui seraient prêts à le donner ou le vendre] », mentionne M. Marquis.

Il ne sait pas encore d’où proviendront les fourrages ni de quel type de foin les producteurs ont besoin, mais les détails seront connus sous peu.

« Le foin va venir de loin, c’est sûr, mais je ne crois pas que les producteurs seront prêts à payer pour le faire venir de l’Ouest. C’est là que des décisions irréversibles [de liquidation de cheptel] se prendront », indique M. Théberge.

Dans un effort de solidarité, l’Union des producteurs agricoles (UPA) a demandé la collaboration de La Terre de chez nous pour offrir des petites annonces gratuites aux producteurs solidaires qui auraient du foin à donner ou à vendre. Pour publier votre annonce, contactez le service à la clientèle au 1 877 679-7809 et faites l’option 1, ou envoyez-nous votre texte à [email protected].

Les producteurs agricoles qui ressentent le besoin de parler peuvent contacter l’organisme Au cœur des familles agricoles au 450 768-6995.

Deux années de suite

La situation est d’autant plus difficile qu’elle survient tout juste un an après une sécheresse qui avait eu un effet catastrophique sur les cultures au Bas-Saint-Laurent. Le Lac-Saint-Jean avait cependant été épargné l’an dernier.

Cette année, les minces réserves de foin se sont épuisées au printemps et les agriculteurs ont fauché tôt en début de saison. Les rendements à la première coupe, censés représenter de 60 à 70 % de la récolte annuelle, ont été faibles et si la tendance se maintient, il n’y aura carrément pas de deuxième coupe dans les deux régions. « Nos granges sont vides », souligne M. Théberge. S’il n’y a pas de deuxième coupe, c’est l’ensemble des producteurs qui seront affectés l’hiver prochain.

Québec interpellé

Le président de l’UPA, Marcel Groleau, a interpellé le ministre Laurent Lessard sur cette question à Vancouver la semaine dernière. « Poser des gestes maintenant pour accompagner ces producteurs-là, [sans] attendre que leur situation financière se détériore, c’est ce qu’on a demandé au ministre », indique M. Groleau. De son côté, par l’entremise de son attachée de presse, le ministre a fait savoir à La Terre qu’il s’assurera que les programmes de La Financière agricole du Québec (FADQ) interviennent « adéquatement et efficacement ».

Les producteurs attendent un signal clair et précis des gouvernements pour corriger la situation. Pour le président de la Fédération de l’UPA du Bas-Saint-Laurent, Gilbert Marquis, le gouvernement fédéral doit aussi intervenir par l’entremise du programme Agri-relance. Il souligne que leur demande de déclenchement avait été ignorée l’an dernier. « Cette année, le gouvernement devra le mettre en place », affirme-t-il. Il dit s’être par ailleurs entretenu à ce sujet avec le cabinet du ministre Lessard le 19 juillet. Le président de la Fédération de l’UPA du Saguenay–Lac-Saint-Jean, Mario Théberge, compte personnellement interpeller le premier ministre Couillard dans son comté de Roberval.

La FADQ a indiqué à La Terre que l’analyse des données de la 1re coupe permettra à l’organisme de statuer sur une éventuelle avance de compensation. Au Bas-Saint-Laurent, le directeur Jean Ruest confirme cependant déjà que les producteurs auront droit à une avance pour couvrir leurs pertes. Il s’agit d’une mesure exceptionnelle appliquée pour une 2e année de suite dans ce secteur pour lequel la Financière avait versé 6,7 M$ l’an dernier pour les pertes de foin, un montant qui pourrait être encore plus élevé cette année.

Avec la collaboration de Martin Ménard