International 17 octobre 2018

Un « COOL » canadien? N’y pensez pas!

Le Canada pourrait-il resserrer les normes d’étiquetage afin de mieux identifier les produits laitiers 100 % canadiens et de limiter les impacts négatifs de l’Accord États-Unis–Mexique–Canada (AEUMC)? Non, répondent des spécialistes.

« C’est certainement possible, mais est-ce que le gouvernement va le faire? Absolument pas! » lance Maurice Doyon, professeur à l’Université Laval. De l’avis de l’économiste agroalimentaire, Ottawa n’a pas la volonté politique de légiférer sur l’étiquetage.

« Il n’y aurait eu aucun problème avec les importations de lait diafiltré des États-Unis si les deux agences fédérales [NDLR : l’Agence des services frontaliers et l’Agence canadienne d’inspection des aliments] l’avaient classé de la même façon. Le gouvernement n’a jamais voulu s’en mêler », raconte-t-il. 

« Les producteurs ont trouvé une solution économique [avec la classe 7]. Ils ont fait ce que le fédéral leur a demandé de faire et voilà qu’il conclut une entente qui leur enlève ça. C’est extrêmement ironique », affirme M. Doyon. Il serait surprenant que le gouvernement Trudeau soit maintenant enclin à resserrer l’étiquetage des produits laitiers. « Il vient juste de signer l’accord et les Américains percevraient ça de façon négative », prédit le professeur. 

Pourtant, les États-Unis sont passés maîtres dans l’art d’étiqueter leurs denrées afin de les distinguer de la concurrence. Leur réglementation portant sur l’étiquetage du pays d’origine pour les viandes (Country of Origin Labeling ou COOL) a donné bien des maux de tête aux éleveurs de bœufs et de porcs du Canada qui exportent leurs produits aux États-Unis. Après huit ans de contestation, le Canada a finalement obtenu gain de cause devant l’Organisation mondiale du commerce (OMC), rappelle Don Buckingham, président et directeur général de l’Institut canadien des politiques agroalimentaires (ICPA). Toute initiative du gouvernement canadien visant à resserrer l’étiquetage pourrait être considérée comme une entrave au commerce et faire l’objet d’une plainte à l’OMC, ajoute M. Buckingham. Pour le dirigeant, des initiatives privées seraient plus faciles à mettre en place.

Maurice Doyon estime pour sa part que la solution passe par les chaînes d’alimentation. « Si les chaînes perçoivent un avantage compétitif, si elles voient que les consommateurs y tiennent mordicus, elles vont mettre de la pression », croit-il.