Forêts 7 mars 2018

Les érablières vivent un boom historique

Le prix du sirop n’a jamais été aussi élevé. De plus, le nombre d’érables entaillés a atteint un niveau record. Avec une mise en barils de 152 millions de livres (Mlb) en 2017, le Québec produit présentement la plus grande quantité de sirop jamais vue. Bref, les producteurs, les acheteurs et les équipementiers profitent à fond de ce boom historique en acériculture.

Le prix offert pour le sirop a particulièrement motivé les acériculteurs québécois à se perfectionner. « La régie de production et l’entretien de la tubulure se sont énormément améliorés depuis 10 ans.  Certains ont même réussi à doubler leur rendement », rapporte Raymond Nadeau, conseiller au Club de qualité acéricole Beauce-Appalaches. Des producteurs atteignent des pics de production inégalés de 8 lb de sirop à l’entaille.

La « cabane à sucre » se professionnalise à une vitesse impressionnante. Les acériculteurs investissent des sommes colossales pour acquérir de l’équipement plus performant et automatisé.

En deux ans, les producteurs auront investi près de 100 M$ dans leurs installations, seulement pour mettre en production les cinq millions d’entailles supplémentaires consenties en 2016 « On n’a jamais vu ça, 10 années de suite à avoir un bon chiffre d’affaires comme ça », résume Jean-François Goulet, directeur des ventes aux Équipements Lapierre. Cet engouement a incité les manufacturiers à innover pour faire progresser la technologie de l’équipement acéricole.

La Commanderie et le bio

Si la hausse des rendements est tendance, l’amélioration de la qualité du sirop l’est aussi. « On était une dizaine en 2010 à assister à des conférences qui portaient sur le développement des saveurs du sirop. Cette année, ce sont plutôt des centaines de producteurs qui sont venus », fait remarquer André Pollender, acériculteur et président de la Commanderie de l’érable. Cet organisme travaille présentement à l’élaboration de trois cahiers des charges permettant de certifier les sirops de qualité.

Le bio est également en vedette; 848 entreprises sur un total de 7 500 détiennent maintenant la certification biologique, un nombre qui a presque doublé en seulement trois ans.

Ambitions

La Fédération des producteurs acéricoles du Québec ne veut pas que ce mouvement s’essouffle. L’organisation est décidée à accroître de 66 % les ventes totales de sirop pour atteindre 185 Mlb d’ici 2023.

Selon l’exportateur Sylvain Lalli, l’industrie de l’érable est vouée à un bel avenir. Le propriétaire des Érablières des Alléghanys reconnaît que les défis sont nombreux. À commencer par la compétition féroce à l’international qui, affirme-t-il, « entraîne des baisses de nos marges ». Il ajoute que si le Québec veut profiter de la demande mondiale pour l’érable, il doit continuer à améliorer la qualité de ses produits et à les offrir à prix compétitif.

Le prix des érablières explose

Sur le terrain, cet optimisme se traduit par une guerre de prix des érablières. « C’est fou! On a observé des prix de 100 à 110 $ l’entaille, comparativement à 45 $ il y a 8-10 ans. Même à un prix moyen de 80 à 85 $ l’entaille, comme on le voit présentement, ce n’est pas rentable. Il y en a qui achètent sans compter », rapporte Raymond Nadeau, conseiller acéricole.

Pas que du positif…

Des financiers, équipementiers et analystes attribuent ce boom de l’acériculture à la structure de contingents de la Fédération des producteurs acéricoles du Québec. Par contre, certains producteurs se disent frustrés de ne pas pouvoir démarrer de nouveaux projets ou d’être freinés dans la croissance de leur entreprise à cause, justement, des quotas de production.

Les États-Unis et le Nouveau-Brunswick, qui n’ont pas de système de quotas, compétitionnent le Québec en produisant de plus en plus de sirop. « Il y a un boom d’installations plus important aux États-Unis qu’au Québec », constate justement l’équipementier Vincent Pépin.

La pénurie de main-d’œuvre affecte aussi les acériculteurs. Certains ont dû commencer à entailler le 15 décembre parce qu’ils manquaient d’employés.

De plus, le conseiller Raymond Nadeau affirme que la recherche n’est pas assez avancée. « On peut pomper l’eau à 27 ou 28 pouces de mercure sans savoir si ça affecte les arbres. On connaît peu le microbiote de la sève », estime-t-il.

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