Environnement 10 novembre 2017

Chauffer son village à la biomasse

Plusieurs localités en milieu rural ont à assumer des factures exorbitantes, liées au chauffage au mazout des nombreux bâtiments municipaux. La conversion à la biomasse provenant de nos forêts se révèle donc une solution de choix lorsque le calcul est réalisé avec rigueur.

« On se disait que dans certaines municipalités dévitalisées, le fait de diminuer la facture de chauffage de l’établissement scolaire de 10 000 $ par année en passant à la biomasse forestière, ça pourrait faire une différence entre le fait de fermer ou pas l’école », mentionne Frédéric Martineau, coordonnateur du projet Chauffons nos villages, de la MRC de Portneuf, près de Québec.

« On l’a prouvé »

À Causapscal, au Bas-Saint-Laurent, le complexe culturel, l’école, l’église et quatre autres bâtiments misent aujourd’hui sur une chaufferie centrale alimentée à la biomasse. « Il a fallu apprendre et s’adapter, mais on a prouvé que le chauffage municipal à la biomasse forestière, ça fonctionne très bien », indique fièrement Simon Roy, directeur général de la Coopérative forestière de La Matapédia.

Plus d’une douzaine de réseaux de chaleur alimentés à la biomasse forestière sont aujourd’hui en activité au Bas-Saint-Laurent, renchérit Giovanny Lebel, agent agricole à la MRC des Basques. Il précise qu’à Saint-Jean-de-Dieu, les écoles, l’église et deux bâtiments totalisant 29 logements sont chauffés par le bois de la forêt privée. « On ne se cachera pas que ç’a été pénible au début avec les chaudières. Mais nous les avons modifiées et nous savons aujourd’hui comment bien les faire fonctionner. Ça se traduit par des économies de chauffage et une baisse de production des gaz à effet de serre [68 tonnes de moins de CO2 par année]. Au lieu d’acheter du mazout de l’extérieur, on dépense l’argent chez nous », explique M. Lebel.

Simon Roy, du Bas-Saint-Laurent, confirme qu’il existe une grande variabilité de performance entre les différents équipements et les types de biomasses. « Le piège, c’est de s’imaginer qu’un système à la biomasse fonctionnera tout seul. Ce n’est pas le cas! Il faut un opérateur qui connaît ça, car ça requiert de l’entretien », affirme M. Roy.

M. Roy estime que le potentiel de développement des réseaux de chaleur à la biomasse est immense en région. Mais pour ce faire, cela nécessite une volonté politique plus ferme et des organisations comme la sienne qui offrent le service clé en main, incluant l’équipement, l’entretien et l’approvisionnement en biomasse.

Ce logement pour personnes âgées à Saint-Jean-de-Dieu, au Bas-Saint-Laurent, est chauffé par un réseau de chaleur misant sur la combustion de biomasse provenant de la forêt privée. Crédit photo : Simon Claveau
Ce logement pour personnes âgées à Saint-Jean-de-Dieu, au Bas-Saint-Laurent, est chauffé par un réseau de chaleur misant sur la combustion de biomasse provenant de la forêt privée. Crédit photo : Simon Claveau

Un calcul essentiel

Afin d’évaluer la réduction des coûts associée à une conversion du chauffage à la biomasse dans 15 municipalités de son territoire, la MRC de Portneuf a mis sur pied une équipe d’experts. Le projet Chauffons nos villages vient tout juste d’obtenir les résultats de ces évaluations et seulement une municipalité peut réellement rentabiliser une telle conversion.

« Le potentiel est moins élevé qu’on pensait, notamment à cause du gaz naturel qui est offert chez nous. Au moins, nous avons l’heure juste, car j’ai entendu des histoires d’horreur où des municipalités ont fini par envoyer à la ferraille leur chaudière à la biomasse. Elles avaient été mal conseillées par des firmes privées ou par des vendeurs de systèmes de chauffage », soutient Frédéric Martineau, coordonnateur du projet.

Trois conditions gagnantes pour justifier une conversion à la biomasse

  • Consommer un niveau important d’énergie pour se chauffer, surtout au mazout;
  • Pouvoir chauffer au moins trois bâtiments majeurs et relativement proches l’un de l’autre;
  • Ne pas avoir accès au gaz naturel. La biomasse coûte environ 3 ¢/kWh contre 3,5 ¢/kWh pour le gaz, sauf que l’équipement pour brûler la biomasse est beaucoup plus coûteux à l’achat et à l’entretien.

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