Régions 9 octobre 2018

Les beaux défis de l’agriculture urbaine

Chaque année, à la rentrée scolaire, David Wees* propose un petit défi à ses étudiants inscrits au cours d’agriculture urbaine de l’Université McGill : calculer dans quelle mesure les terres agricoles de l’île de Montréal peuvent nourrir ses habitants. 

« En se basant sur une superficie de 2 000 hectares et sur un rendement moyen de 26 tonnes/hectare [de légumes cultivés au jardin], on obtient un résultat assez impressionnant : ces terres pourraient combler environ 15 % des besoins en légumes des Montréalais », explique l’agronome. 

Or, si l’on décidait de cultiver des légumes dans tous les espaces verts de la ville, parcs et terrains en friche y compris, cette proportion grimperait à 75 %. Bien que ce pourcentage soit appréciable, il ne concerne que les légumes, nuance toutefois le professeur. Les gens consomment aussi des fruits, de la viande, des œufs et des produits laitiers. 

Maximiser le rendement

Grâce à cet exercice, les futurs agronomes prennent donc conscience que le principal facteur limitant en agriculture urbaine est l’espace. D’où l’importance de maximiser le rendement des cultures, comme le démontrent les travaux du chercheur.

« Il y a quelques années, mes collègues et moi avons fait pousser des plants de patates douces en pots. Nous avons obtenu des rendements qui atteignaient jusqu’au double du rendement aux champs! Cependant, les tubercules étaient souvent déformés ou trop petits. » 

Heureusement, M. Wees a depuis obtenu plus de succès avec d’autres cultures au grand étonnement de ses étudiants. Au début du mois de septembre, ces derniers se mettent à la plantation de légumes sur des parcelles de terre adjacentes au Campus Macdonald, situé à Sainte-Anne-de-Bellevue. Ces plantations tardives permettent de récolter une bonne variété de végétaux qui poussent vite et tolèrent bien le froid comme la laitue, le chou frisé, le chou-rave et le chou chinois. 

Pionnière

Au chapitre de l’agriculture urbaine, l’Université McGill fait figure de pionnière grâce, entre autres, au projet Nourrir McGill mis sur pied par des étudiants en 2008-2009 et qui consiste à acheminer les fruits, les légumes et les œufs produits à la ferme du Campus vers les cafétérias de l’Université au centre-ville. Entre août et novembre, on arrive ainsi à combler environ 50 % des besoins des étudiants en fruits et légumes et près de 100 % de leurs besoins en œufs. 

De telles initiatives convaincront-elles davantage d’étudiants en agronomie de travailler en milieu urbain? « Étant donné que bon nombre de nos futurs agronomes ont grandi en ville, je crois qu’ils seront nombreux à s’impliquer en agriculture urbaine », se réjouit M. Wees.  

Des objectifs distincts

Alors que le principal objectif de l’agriculture rurale est la rentabilité, les adeptes de l’agriculture urbaine apprécient ses dimensions sociales et éducatives. Plusieurs s’y adonnent pour offrir des produits frais à leur entourage ou pour faire découvrir aux enfants comment poussent les fruits et les légumes.

* David Wees est le directeur adjoint du programme Gestion et technologies d’entreprise agricole au Campus Macdonald de l’Université McGill. 

Marie-Claude Ouellet, Agence Science-Presse